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17 mai 2024

Jean-Pierre Spiès, magistre de nissard

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jpg_nissart.jpgNice-Premium : Bònjorn, Jean Pierre. Alora, vous voici dans les pages web de Nice Premium pour un petit entretien mais au fait comment et quand est née la passion pour le niçois, langue provençale ?

Jean Pierre Spiès : Depuis toujours, mais de loin. J’écoutais la langue avec plaisir, sans savoir la parler, et sans la connaître vraiment.

N-P : Y a t il un lien avec votre famille ?

J-P S : Oui, les anciens parlaient le niçois, mais à partir d’une génération (entre deux guerres), ils ont cessé de la transmettre. C’était la langue maternelle pour mes grands-parents, mes parents ne la parlent pas. J’aimais lire des textes en occitan. Je disais toujours :« Le niçois, lo capissi mas non lo parli ! »; j’ai décidé d’aller plus loin et de l’apprendre vraiment.

N-P : Pourquoi cette langue et pas une autre ?

J-P S : J’ai pratiqué pas mal de langues, sans les approfondir vraiment. Mais celle-là, je la sens chanter au fond de moi, j’ai l’impression qu’elle vient de très loin et qu’elle me permet d’exprimer la lumière du pays et la chaleur des relations. Et puis je sens que cette langue porte un esprit d’ouverture, de tolérance, qui nous est transmis depuis les troubadours qui ont d’une certaine manière inventé le respect de l’autre.

N-P : D’ailleurs faut il faire la distinction entre le niçois et langue provençale ?

J-P S : C’est la même langue, qui est parlée sur un très vaste territoire, 33 départements sur le territoire de la France, de vallées alpines en territoire italien et le Val d’Aran en territoire espagnol. On l’appelle occitan, langue d’oc ou -ça a été son appellation courante pendant des siècles- provençal. Cette langue n’est pas uniforme dans tout cet espace, il y a plusieurs dialectes et des variations d’un lieu à l’autre; mais ces différences n’empêchent pas la compréhension des interlocuteurs, un niçois du bord de mer comprend sans difficulté un locuteur de Contes ou de Grasse même si leurs parlers ont quelques différences de prononciation ou de formes verbales. J’ai été surpris de toutes les similitudes entre le niçois et l’auvergnat qui est parlé dans le village de ma grand-mère paternelle entre Aurillac et le Quercy, et de la richesse de la langue en lisant des textes de tous les dialectes. Le niçois a ses particularités qui sont fortes et par elles se singularise du provençal.

N-P : Elève puis professeur aujourd’hui, comment change t on de « casquette » ?

J-P S : J’ai eu plaisir à participer aux cours de Jean-Pierre Baquié, c’était très convivial. Et puis lorsqu’il m’a demandé de faire le cours à sa place lorsqu’il a organisé un autre cours à Nice, j’ai accepté tout naturellement de le remplacer. C’est un plaisir de partager ce que j’ai appris.

N-P : Comment l’enseignez vous ?

J-P S : Le but est d ‘apprendre à la fois à parler, lire et écrire la langue. Pour cela les cours sont « interactifs », on apprend ensemble, chacun partage avec les autres ce qu’il connaît, certains connaissent des proverbes, un autre a entendu dire cela dans sa famille, le souvenir d’un mot oublié revient… Ma tache est de susciter l’échange, d’apporter des textes, des situations. Je donne des notions de grammaire, de syntaxe mais dans le même temps, pendant ces cours, j’apprends aussi un tas de choses des escolans. Et puis la convivialité s’exprime aussi quand on partage le verre de l’amitié à la fin d’un cours, comme la semaine dernière pour fêter les rois !

N-P : Outre l’enseignement de cette langue, d’autres activités ?

J-P S : Mon activité professionnelle est déjà très exigeante et demande du temps. J’anime par ailleurs un atelier de théâtre en niçois, et puis je ne néglige pas la vie de famille.

N-P : La cuisine, non ?

J-P S : Si, c’est un vrai plaisir de réaliser de bon plats. J’aime utiliser les légumes, les fruits, éplucher, couper, pétrir, passer du temps à préparer tout ça. En plus, ce qui est fait « de maion »est encore meilleur ! C’est une activité de tous les jours, et en plus une détente.

N-P : Une rencontre qui vous a marqué depuis que vous connaissez le niçois ?

J-P S : Des rencontres, surtout ! Avec des auteurs, des chanteurs, Mauris qui depuis des dizaines d’années chante en niçois et se déplace de classe en classe pour apprendre aux enfants des chansons en niçois pour le Carnaval; et puis toutes les personnes qui, chaque jour, répondent à un « bònjorn » ou à un « alora » ! C’est à ça que sert une langue !


N-P : Qu’est ce que cela vous apporte ?

J-P S : Du plaisir.

N-P : A tout âge peut on apprendre ?

J-P S : Bien sûr !

N-P : Une anecdote ?

J-P S : Ma soeur a quitté Nice depuis plus de trente ans. Elle ne parle pas le niçois. Un jour, un de mes fils était chez elle, à Lyon. A un moment, alors qu’ils parlaient à table de chercher quelque chose, il a dit: »C’est dans le charaf la-haut ! » Ma soeur a répondu machinalement : « Alors, on va le trouver ! » Tous les cousins se sont regardés en se demandant de quoi ils parlaient ! Ils se sont rendu compte que c’était un mot niçois qu’ils possédaient en commun, sans y penser. En parlant, nous utilisons tous les jours sans y faire attention de nombreux mots niçois. C’est une richesse qu’il faut connaître, préserver et partager. Transmettre la langue est un moyen de garder cette richesse et de favoriser l’échange et la communication.

Alora !! ça vous tente de faire chanter cette langue du sud dans votre voix ?
Sachez que le cours est animé par Jean-Pierre Spies et qu’il a lieu tous les jeudis de 8 heures 30 à 20 heures à la salle de judo derrière le gymnase de Drap. Pour suivre les cours donnés à Drap – Cotisation annuelle : 20 euros

Site internet : Http://ieo06.free.fr

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