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17 mai 2024

Nuit (à dormir) debout

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Profitant de mon passage à Paris, je me suis rendu place de la République pour la première fois depuis l’installation de « Nuit debout ».

En résumant je dirais que si Lénine avait défini le communisme comme « les soviets plus l’électricité », « Nuit debout » c’est un peu les commissions plus facebook. Les deux instruments étaient ce mercredi régulièrement évoqués par les trois cents personnes assises sur la partie nord de la place pour lutter contre le complot médiatico-économico-politique au service de la finance internationale et de la loi El Khomri (évoquée de façon obsessionnelle). C’est ainsi qu’il existe même une commission anti-commission et que quelques centaines de likes peuvent être un pas décisif vers la révolution universelle.

Le public est juvénile (« Jeunes blancs de la classe moyenne » selon l’autoportrait d’un orateur). Les marginaux restent à l’écart pour jouer de la musique ou fumer sous des tentes igloos. Ces derniers constituent le noyau dur des délégations « Nuit debout » pour les opérations coup de poing de soutien à la CGT. Quelques heures auparavant, j’ai été témoin à Bercy dans le quartier de mon hôtel à un face-à-face tendu entre eux et les forces de l’ordre.

Le parallèle avec les AG de Mai 68 n’est pas absurde, certains slogans en attestent («jouir plutôt que reproduire»), mais celui-ci est purement formel. En effet, aussi sympathique que soient les prises de paroles, elles consistent la plupart du temps pour ne pas dire tout le temps à enfoncer des portes largement ouvertes. Dans ce discours anticapitaliste, pas un argument, pas une proposition qui n’aient été formulés dans les années 70 par la mouvance autogestionnaire, dans les années 2000 par les théoriciens et les praticiens de la démocratie participative (c’était même une partie très importante de mon programme municipal en 2001) et par les altermondialistes d’ATTAC quelques années plus tard.

Par ailleurs le décalage est abyssal entre ces discours et les gens réels que les orateurs veulent représenter, on peut s’en émouvoir mais c’est ainsi. Par exemple, le cumul des mandats qui est le leitmotiv des discours quand il s’agit d’évoquer une nouvelle éthique politique. L’apathie avec laquelle les citoyens niçois ont accueilli le dernier jeu de chaises musicales de leurs notables atteste de ce décalage.

Pour changer le monde, il va falloir un autre logiciel. En attendant ce mouvement permet à des centaines de jeunes probablement politiquement vierges de se conscientiser. Ce n’est déjà pas si mal et comme on dit dans mon pays « Ça ne mange pas de pain » même si ces longues séances sont un peu « à dormir debout » !

par Patrick Mottard

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