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16 mai 2024

L’Edito du Psy : « Fitna » sur la burqa et la laïcité musulmane

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jpg_bobine2008-52.jpgLa proposition formulée par une soixantaine de députés, de gauche comme de droite, de créer une Commission d’enquête parlementaire sur le « port de la burqa » possède le mérite de poser le problème. Elle est loin de pouvoir le résoudre. Envisager de légiférer sur la question ne constituerait en effet qu’un pis-aller : ce sont aux raisons et aux mécanismes qui motivent -voire obligent- une femme à porter ce voile intégral sur le territoire français qu’il conviendrait de réfléchir. « L’ampleur du phénomène » qui inquiète tant les élus, décidés à y remédier au nom de la « laïcité », ne doit pas masquer sa puissante signification psychologique : un désir de structuration mentale contenu dans la contrainte vestimentaire, motif souvent invoqué par des françaises fraîchement converties à l’islam, et un déficit narcissique de l’être moderne toujours attiré par l’offre compensatoire d’un absolu identitaire. C’est en ce sens, on l’espère, que Dalil Boubakeur a pu parler d’une « marque culturelle » des femmes qui ne se sentaient pas « généralement forcées » de revêtir la burqa. Encore faut-il s’interroger sur le « forçage » indirect d’un prosélytisme salafiste radical qui prétend combler l’incapacité des idéaux et des symboles républicains à fournir les repères fondamentaux d’une société.

Signe des temps, le débat jette la « discorde » au sein même du gouvernement : Luc Chatel retient la possibilité de « légiférer » sur cette pratique religieuse alors qu’Eric Besson juge cette éventualité « inefficace ». Rama Yade ne serait « pas contre » une loi tandis que Fadela Amara se dit « favorable à une interdiction totale ». A l’image de tous les dossiers qui abordent l’islam, cette « Fitna » traverse également les milieux musulmans. Le Conseil Français du Culte Musulman se dit « fermement opposé » à la mise en place de cette Commission d’enquête. Interrogé sur ce thème, Marouane Boulouednine, Conseiller municipal niçois et Président de « Mosaïc », la « Fédération laïque des citoyens de sensibilité musulmane » pourtant destinée à parler « au nom de cette majorité silencieuse de 5 à 6 millions de musulmans français », dit « refuser l’alternative entre la perte d’identité et le tout religieux ». Il n’a toutefois pas souhaité s’exprimer précisément sur ce sujet, probablement jugé trop sensible. De son côté, Azzédine Bouamama, industriel cannois engagé dans la création d’une instance fédérative nationale regroupant plusieurs associations locales, ne souhaite pas rester silencieux sur « le dictat d’une minorité de salafistes agressifs, haineux, obtus et de despotes organisés comme une secte ». « Favorable à une législation », il estime qu’une « majorité de femmes subit le joug, la terreur, la violence matriarcale ou patriarcale » précisant que le « rôle de [notre] République laïque est de protéger ses citoyens ».

Si la Mosquée de Paris et le Conseil Français du Culte Musulman s’occupent essentiellement des problèmes « cultuels », la question de la création d’une instance musulmane laïque, interlocutrice plus politique et culturelle des autorités françaises, se pose avec encore plus d’acuité. A condition de savoir qui fait quoi. Alors que Marouane Boulouednine vient de lancer le 12 juin dernier sa Fédération « Mosaïc » en se réclamant d’un « soutien total » de la part de Claude Guéant, le Secrétaire général de l’Elysée, Azzédine Bouamama poursuit des négociations avancées avec la sous-Préfète Malika Benlarbi -une personnalité issue de l’immigration et largement ministrable dans un prochain remaniement-, chargée par l’Elysée de suivre cet épineux dossier. Des négociations destinées à mettre en place une « Fondation », fédérant sur tout le territoire national les différentes initiatives locales en la matière.

Ce pluralisme d’initiatives et d’influences entremêlées ne facilite pas toujours la lisibilité et la compréhension de l’orientation que les pouvoirs publics entendent donner à leur action. L’absence notable des représentants du ministère de l’intérieur -et des cultes- à la récente conférence des « Imams de France » -pourtant formés au sein de l’Institut catholique de Paris à la demande de la République- et à laquelle assistaient le Président du Crif et le grand Rabbin de Paris, est ainsi incompréhensible pour le profane, musulman ou non.

Au-delà de son intervention devant le Congrès sur ce thème, le chef de l’Etat pourrait saisir cette occasion pour lancer un « chantier » sur les moyens de promouvoir et d’institutionnaliser cette « laïcité musulmane ». Une opportunité à même d’éclairer les Français sur sa propre conception de la Loi de 1905.

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