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29 avril 2024

Année Puccini : « Tosca » chute et l’Opéra de Nice s’élève.

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Cette tragédie sanglante se veut emblématique du compositeur, selon le critique Alain Duault qui en a présenté la genèse lors d’une captivante conférence en présence de Paul-Emile Fourny à la FNAC, le jour précédent la première. Si « Tosca » constitue un tournant dans le style du compositeur, lui-même incarne un moment charnière dans l’art lyrique français. « Tosca », joué en 1900, se situe donc à cheval sur deux siècles et au « milieu » des neuf opéras composés par Puccini, « quatre avant, quatre après, précise Alain Duault. Quant à « Turandot », son chef d’œuvre posthume puisque ce dernier fut créé deux ans après sa mort en 1924 et dirigé à la Scala par le chef Arturo Toscanini, il représente l’ultime exemple de l’opéra « grand public » tel qu’il était possible de le concevoir au début du XXème siècle.

tosca7bis.jpgNé en Toscane, dans la ville de Lucca, le compositeur italien fut profondément marqué par deux œuvres lyriques. Il entendit la première à Pise le soir du 21 août 1875. Agé de 17 ans, il se rendit à pied de sa ville natale dans la cité de la célèbre tour penchée, soit 25 km, pour écouter la nouvelle création de Verdi, « Aïda ». Un déclic dans la vie de Puccini puisqu’il décidera de consacrer désormais son travail d’écriture à ce genre musical. La deuxième influence proviendra du « Carmen » de Bizet. Au confluent de ces deux œuvres, Puccini devient le compositeur pour lequel « l’énergie musicale apporte au personnage la violence scénique, un engagement physique et charnel des acteurs ». Du début jusqu’à la scène finale, « Tosca » ne saurait le démentir.

Signe puccinien par excellence, un enchevêtrement du musical avec le vocal repérable dès l’ouverture : le rideau se lève dès la première mesure pour faire entendre un chanteur dans un décor à la fois glacé et raffiné, celui d’un intérieur d’église. Il ne faut que quelques minutes au Ténor Brandon Jovanovitch pour conquérir le public. Cet américain du Montana, deux fois primé lors d’auditions du MET de New York, ne manque pas de saisir par l’aisance de son jeu corporel qui donne le sentiment d’un grand naturel dans son expression vocale. Il chante comme il respire en quelque sorte, sans effort ni artifice. Effet saisissant qui s’empare du public et le transporte instantanément au cœur de l’action dramatique. « The magic in performance » dirait le professeur américain de Masterclass Peter Elkus. Quant à la voix, elle épouse le registre du jeu pour s’enrichir de multiples nuances oscillant entre le sentiment amoureux où le Ténor semble filtrer les notes sans les altérer et la puissance de la révolte où elle accentue les résonances douloureuses.

tosca1bis.jpgHeureusement pour le public, les deux autres rôles titres, « Tosca » et le Baron Scarpia atteignent d’identiques sommets. Le machiavélisme du tyran est magnifiquement incarné par le niçois Franck Ferrari. Lequel sait également imbriquer action scénique et registre mélodique, parvenant à teinter de raffinement, la plus sadique des cruautés. Choix personnel ou influence de sa silhouette délicate, Nicola Beller-Carbone campe pour sa part, une « Tosca » ingénue, presque fragile, éloignée des interprétations plus traditionnelles de la maîtresse femme aux accents hystéroïdes. Elle semble du coup moins encline à mettre en œuvre le déchaînement exacerbé de la jalousie amoureuse, capable de la conduire au meurtre du baron Scarpia. Elle émeut toutefois par les extraordinaires qualités de ses techniques vocales, littéralement proches de la perfection. Rien d’étonnant pour cette allemande qui fit ses débuts auprès de la très grande wagnérienne Astrid Varnay. Voilà pour les artistes lyriques. tosca3bis.jpg

Mais le tableau serait passablement incomplet si la direction musicale et la mise en scène n’étaient évoquées. Le Maestro Fabrizio Carminati est plutôt un « donnizzetien » tient à préciser son agent. Il s’essaie pour la première fois au répertoire de Puccini même s’il est un habitué de la fosse d’orchestre niçoise où il avait déjà dirigé « Norma » avec succès en octobre 2006. Il aime, précise encore son agent, la philharmonie de Nice. Celle-ci le lui rend bien tant sa direction sans faille fut longuement ovationnée par le public et les musiciens eux-mêmes. Il est presque injuste d’évoquer finalement la composition des décors et l’élégance des costumes, création de Louis Désiré, ainsi que la puissance suggestive de la scénographie. Cette dernière, fruit du travail de Paul-Emile Fourny, a indubitablement contribué aux conditions dramatiques : des anges noirs aux mouvements corporels tellement harmonieux qu’ils semblent les rendre quasi invisibles. Ils accompagnent pourtant, tels des esprits malfaisants, les chanteurs et évoquent cet ascendant néfaste à même de plonger le public dans l’atmosphère sombre et vénéneuse typique du mélodrame de « Tosca ». D’où, si l’on ose dire, la surprise de la chute finale : censée faire se précipiter « Tosca » du haut d’une tour du château Saint-Ange, la mise en scène opte délibérément pour l’interprétation rédemptrice. Accrochée aux pieds d’une statue qui pourrait être celle de la « Madone » tant invoquée par l’héroïne au cours du drame et dans une sorte d’assomption digne d’une wagnérienne, Tosca s’élève. L’opéra de Nice ne peut qu’en sortir grandi.

« Tosca » : Drame en 3 actes de Giacomo Puccini.
Prochaines représentations : mardi 22 janvier à 20h00 et jeudi 24 janvier à 20h00.
Opéra de Nice : 4 & 6, rue Saint-François-de-Paule, 06000 Nice.
Locations au 04 92 17 40 79
Standart : 04 92 17 40 00

Signalons en outre deux événements :

  • Le mercredi 23 janvier 2008 à 16h00, Paul-Emile Fourny, Directeur général de l’Opéra de Nice, tiendra une conférence sur le thème « Mettre en scène un ouvrage lyrique », dans le Grand amphithéâtre du Centre Universitaire Méditerranéen (Entrée libre).

  • Dans le cadre de la deuxième édition de la journée nationale « Tous à l’Opéra », l’Etablissement lyrique niçois accueillera le public le samedi 16 février 2008 à partir de 11h00 avec un programme composé de diverses conférences, de prestations des chœurs de l’Opéra et des chœurs d’enfants, ainsi que des manifestations de la troupe de Ballet de l’Opéra.

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