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23 avril 2024

Le « Nozze di Figaro » à l’Opéra de Nice : les femmes à la fête !

jpg_nozze-figaro-opera-nice.jpg Dans un débat récent relaté par « Télérama sortir » du 27 février 2008*, deux metteurs en scènes d’opéra Krzysztof Warlikowski et Olivier Py s’opposent sur la conception de l’art lyrique. En « homme du XXème », le premier estime indispensable de « tout transposer sur le plan politique », de « s’emparer d’une œuvre pour faire bouger les choses », quitte à être un « éléphant dans un magasin de porcelaine ». Le second, en revanche, se veut davantage un « traducteur », soucieux davantage de la « métaphore » que du réalisme et « refusant de tenir l’opéra pour un lieu de subversion politique ».

En fait, l’un et l’autre ont en quelque sorte raison. Et il suffisait pour s’en convaincre d’assister à la première des « Nozze di Figaro » à l’Opéra de Nice : c’est en respectant la volonté du librettiste Da Ponte et la partition musicale de Mozart que l’œuvre délivre tout son message politique. Qui pourrait en douter alors que cet Opera Buffa fut joué pour la première fois au Burgtheater de Vienne en 1786 ?

Il fallait en effet une dose certaine de courage non seulement pour mettre en musique la comédie de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais, personnage déjà sulfureux par le nombre de ses conquêtes féminines, mais également pour braver l’impitoyable censure de l’Empereur Joseph II qui avait interdit la représentation théâtrale du « Mariage de Figaro ». On l’aura compris : le livret et la musique devaient se substituer aux paroles prohibées. « A mesure que j’écrivais les paroles, raconte Da ponte, Mozart composait la musique ». Cinq actes de la pièce initiale de Beaumarchais réduits à quatre par Da Ponte et une mise en musique qui colore habilement l’intrigue pour la rendre acceptable sans en ôter la moindre parcelle du message initial. Le héros apparent n’en reste pas moins un valet mais le véritable triomphe lui échappe : sur fond d’aspiration à l’égalité, c’est bien la femme qui est humainement et politiquement célébrée dans cette œuvre lyrique. Femmes partagées entre soumission, celle due au rang aristocratique autant qu’à l’époque, rôle dévolu à la Comtesse Almaviva admirablement interprétée lors de cette représentation par Helena Juntunen, inoubliable et émouvante soprano à la voix aussi pure et délicate que la soie et dont les deux airs, celui notamment pathétique de son apparition au deuxième acte, semblent avoir ensuite inspiré la Maréchale dans le « Rosenkavalier » de Richard Strauss. Femme de condition plus modeste, plus encline à la révolte et à la ruse, Suzane jouée par Anne-Catherine Gillet, propose une voix plus marquée par l’engagement sauf au moment où, pour les besoins du stratagème, elle endosse les habits de la Comtesse et montre ainsi toute l’étendue de son registre vocal.

Ni révolutionnaire, plutôt classique même, la mise en scène de Lubor Cukr n’écarte pourtant pas le mélange de comédie et de tragique qui inspire l’ensemble de la partition. Dans un entretien, l’artiste originaire de Prague, ville qui consacrera l’œuvre en 1787, explique qu’il tient pour essentiel « de faire apparaître les principaux changements des personnages », leur « révolution » et « comment ils reviennent à la nature ». Au-delà de l’indiscutable plaisir artistique de cette soirée, celle-ci ne manque pas de susciter une réflexion politique qui ne perd rien, en ce début de XXième siècle, de son acuité.

Signalons aux lecteurs de Nice-Premium deux prochaines productions intéressantes :

-« La Milonga de Buenos Aires », spectacle chorégraphique des Ballets de l’Opéra de Nice et Astor Piazzola. Opéra de Nice : 7, 8 et 9 mars 2008. Renseignements et réservations : 04 92 17 40 79

-« La Giuditta », Oratorio d’Alessandro Scarlatti, par l’Ensemble baroque de Nice, Eglise St Martin-St Augustin : 7 et 9 mars 2008. Renseignements et réservations : 04 93 80 08 74

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