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20 avril 2024

L’Edito du Psy- Facebook: après les bébés, les foetus bientôt en ligne?

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jpg_bobine2008-102.jpgOn connaît tous la chanson: c’est le plus beau bébé du monde! Mais le « monde » de l’amour maternel ne suffit plus: 73% des femmes européennes dont 74% de Françaises ont déjà publié sur Internet des photos de leur enfant avant leur deuxième anniversaire et 26% dès les premières semaines. 13% d’entre elles ont même mis en ligne leur échographie. Un chiffre qui atteint 34% chez les Américaines et 37% chez les Canadiennes. L’étude, réalisée par l’éditeur d’antivirus AVG montre également que 7% des Français de moins de deux ans disposent de leur adresse email personnelle et 2% ont un profil sur les réseaux sociaux. Facebook: socialisation du lien. Son succès tient à sa capacité quasi instantanée de mettre en contact, de décloisonner les êtres humains. Remède bon marché aux défaillances narcissiques d’hommes et de femmes souvent fragilisés par un manque de reconnaissance. Faut-il toutefois que cette reconnaissance passe par celle, forcée et sans tenir compte des conséquences futures, de leur progéniture? La photo du bébé restera ainsi gravée sur le Net, à l’image d’un tatouage qui témoigne à même la peau d’un événement personnel et exceptionnel. Quid de cette intrusion scopique et saturante dans la psyché encore chancelante du nouveau-né? Comment s’expliquera-t-il le passage par le virtuel pour attester de l’amour maternel? Une existence « facebookée » ne demeure-t-elle pas induite, sinon dépendante du regard de l’autre? Mise en avant par le site, la notion de partage vise à déculpabiliser ce qui demeure une manifestation du désir. Avec en prime, une immédiateté qui correspond parfaitement au rythme de l’hyperconsommation : cliquer, c’est obtenir. Une illustration de la toute puissance infantile.

Certes, et non sans quelque illusion, Facebook a su rendre accessible à l’échelon humain une mondialisation où de multiples structures et pouvoirs se sont affranchis de distances et de limites spatio temporelles. Course que l’homme avait du mal à suivre. Facebook constitue peut-être le pendant individuel à cette gigantesque dynamique. Un pendant qui accompagne plus qu’il ne résiste.

Indirectement, ces dérives périnatales de Facebook révèlent des pathologies cliniques plus générales de l’identité, du lien et de l’attachement au travers de l’addiction à Internet. Magnifique paradoxe: les parents qui mettent aujourd’hui leurs bébés en ligne, seront-ils demain les mêmes qui consulteront les spécialistes de la psyché pour s’inquiéter de la dépendance de leurs ados à la Toile? L’assuétude au tabac commence, pour certains addictologues, à la première cigarette car celle-ci contient des substances addictogènes qui ont pour but de faciliter « l’accrochage » du fumeur. Pour Internet et Facebook, l’obligation répétée du comportement se substituerait-elle aussi au plaisir ? La meilleure des drogues est celle qui ne se présente pas et n’est jamais perçue comme telle. Surtout si l’individu se met à estimer que Facebook est devenu la vie sociale en tant que telle, que cette vie ne saurait exister, se développer en dehors du cadre de ce réseau virtuel. Il feint d’ignorer une réalité, celle du monde qui l’entoure et qu’il découvrira peut-être un jour avec une stupéfaction accompagnée d’une bonne dose d’effroi! Au risque de dépendance s’ajoutent les périls de dilution des affects, de la mise à l’écart de l’émotion. Celle inattendue, imparable, déconcertante mais tellement humaine, de la rencontre inopinée avec l’autre en chair et en os. Seule, cette dernière offre une altérité qui nourrit en retour une identité. Dans Facebook, cette rencontre semble largement aseptisée.

De même qu’une fonction de géolocalisation de Facebook offre désormais de repérer l’humain au mètre près, la mise en ligne des bébés sur ce réseau ne contribue pas à préserver l’intimité. Ceux et celles qui acceptent de tenter l’expérience, en acquérant par simple curiosité cette nouvelle fonctionnalité, encouragent le dépassement ultérieur d’autres frontières. Il ne devront pas ensuite venir se plaindre lorsque l’abus aura été commis.

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