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6 mai 2024

L’Edito du Psy : Grippe A, la pandémie de « l’autre »

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jpg_bobine2008-56.jpgMortalité directe « 100 fois supérieure » à celle de la grippe saisonnière, plans nationaux de vaccination obligatoire, degré élevé de contagiosité, retards évoqués dans la livraison des vaccins, questionnement sur leur innocuité, aucune journée ne se passe sans charrier son lot d’expertises et de déclarations de spécialistes plus contradictoires les unes que les autres. Certains se réjouiront de cette litanie dans laquelle ils tenteront de se forger une opinion. D’autres seront plus vraisemblement découragés par ce foisonnement à même de semer davantage le doute dans leur esprit.

Soucieux de juguler un possible effet de panique, le gouvernement communique régulièrement dans une relative transparence, y compris celle de ses incertitudes, ce qui vaut à Roselyne Bachelot son légitime « plutôt en faire trop que pas assez ». Il est toutefois à redouter que cette succession d’interviews et de rapports dont la presse se fait quotidiennement l’écho, ne vienne nourrir l’effet inverse. Au risque de banaliser le danger ou d’en accentuer le déni: c’est dans l’après-coup que l’on saura si la stratégie était la bonne. Autrement dit -mais peut-il en être différemment en l’espèce- trop tard.

Avec un facteur supplémentaire à prendre en considération: si son déferlement devait se révéler plus létal qu’annoncé, la grippe A « H1N1 » deviendrait rapidement la « pandémie de l’autre ». Responsable involontaire de sa transmission, « l’autre » pourrait, dans ces circonstances exceptionnelles, accentuer jusqu’à l’hystérie collective, un rôle qui lui est déjà traditionnellement dévolu : l’incarnation symbolique depuis la plus tendre enfance de la menace extérieure, celle qui révèle à l’enfant qu’il n’est plus seul au monde, qu’il se doit de composer avec le principe de réalité, jusqu’au moment où, devenu adulte, il peut même sentir qu’un « autre en lui » décide à sa place, « le moi n’étant plus maître dans sa maison » pour plagier Freud. La propagation du virus H1N1 par simple proximité est à même d’alimenter, en cas d’une mutation par exemple qui le rendrait particulièrement virulent, une source d’appréhension, sinon d’angoisse inconsciente sur l’énigmatique et alarmante présence de « l’autre ». Il faut espérer que la sage recommandation des gestes prophylactiques -lavages répétés des mains et port du masque dont se délecteront les obsessionnels, mise à « distance sociale » et séparation physique qui satisferont les paranoïaques- demeure des mesures aussi efficaces que provisoires. On en devine la raison: dans son échange avec « l’autre », la psyché risque d’être singulièrement tiraillée entre l’impératif destiné à protéger une intégrité corporelle -la sienne ou celle de l’aimé(e)?- et l’injonction de l’isolement vécue comme une mise à l’index hautement culpabilisante.

Au plus fort d’une crise qui, pour le moment, demeure encore hypothétique, les comportements humains déjà soumis à rude épreuve avec la crise économique et le chômage n’en sortiront certainement pas intacts sur le plan psychologique. On peut toujours croire dans la solidarité des êtres. En cas de danger ultime, on sait ce qu’il en advient : narcissisme bien ordonné commence toujours par soi-même.

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