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8 mai 2024

En France comme en Europe, la victoire de l’abstention

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Nice Premium doit à la disponibilité de Frédéric Ganneval cette analyse du vote et du résultat des élections européennes qui comme Artenice l’a annoncé, il y a quelques jours, « n’est pas une surprise ».


eurosondage.jpg En France comme en Europe, la victoire de l’abstention avant celle des euro-sceptiques ou euro-détracteurs

Évolution du taux d’abstention en France comme en Europe depuis 1979

Depuis 1979, date à laquelle l’élection des eurodéputés se fait au suffrage universel direct, personne n’a pris la mesure de la désaffection de l’électorat. En 1994 en France, un sursaut de participation avait été provoqué essentiellement par la participation d’une liste conduite par Bernard Tapie, liste qui raflait 13 sièges sur les 85 qui revenaient à la France. Depuis l’abstention battait record sur record jusqu’en 2009.

En 2014, le taux d’abstention français rejoint le niveau moyen européen. Ce nouveau regain de participation en France s’explique (+3 points/2009) par l’expression d’un mécontentement déjà exprimé lors des élections municipales sur la situation économique en France (34% des électeurs), le désamour des électeurs pour la classe politique en général mais également par la peur que l’Europe ne joue pas dans l’intérêt du peuple français, d’ailleurs le spectre du traité transatlantique a également pesé sur cette élection.

Ce taux d’abstention pandémique aurait dû, à lui seul mobiliser l’institution européenne pour mieux communiquer sur son rôle et son importance. Au lieu de cela la classe politique dans sa grande majorité et les médias n’ont cessé de clamer que, perdant de leur pouvoir local, les gouvernements devaient se plier aux directives européennes et qu’en gros, s’ils échouaient ou s’ils ne faisaient pas ce qu’ils voulaient c’étaient la faute de l’Europe.
Il ne faut donc pas s’étonner du désintérêt des électeurs pour l’institution européenne voir comme on le constate aujourd’hui par son rejet.

Le raz de marée euro-sceptique en Europe

Pour les raisons évoquées juste avant, nous pouvons constater une montée importante des partis dits pudiquement
eurosceptiques voir totalement hostiles à l’Europe (environ 145 sièges obtenus sur les 751, soit 19%).
Mêmes si l’ensemble de cette poussée vient d’un rejet de l’Europe, les visions sont très disparates et vont du Ukip en Angleterre qui ne souhaite pas d’alliance avec le FN qu’il juge trop sulfureux et vont jusqu’aux candidats nazi ou néo-nazi allemand, néerlandais ou grecs jugés non fréquentable par le FN français qui poursuit son relooking politiquement correct pour s’inscrire durablement dans le paysage politique français.

Pour qu’un groupe parlementaire puisse se constituer il est nécessaire de regrouper 25 parlementaires d’au moins 7 pays différents. Aussi, pour pouvoir créer un ou plusieurs groupes politiques au sein du parlement européen, les euro-sceptiques devront s’unir autour de leurs visions communes : l’immigration, le protectionnisme national, la question de l’élargissement, …

Mais l’enjeu pour les euro-sceptiques n’est pas seulement un enjeu européen. Ces partis vont tout faire, à travers cette élection, pour acquérir une crédibilité auprès de leur électorat pour présenter leurs listes lors des élections présidentielles dans chacun de leur pays.
Cela n’est pas encore gagné. Le rejet de l’Europe exprimé aujourd’hui ne concerne que 8% de l’électorat européen (19% des 43% des électeurs qui ont participé à ce scrutin) ou encore 11% de l’électorat français.

Le FN est-il un vrai séisme comme on le lit partout ?

Le FN arrive très largement en tête de ce scrutin. 4.5 millions de français ont voté pour le FN lors de cette élection, contre 5.5 millions lors de la dernière élection présidentielle de 2012.

Tous les sondages (pour une fois) ne s’étaient pas trompés même s’ils n’avaient pas anticipé l’écart important creusé par le FN avec les autres formations politiques. Il ne s’agit pas d’un nouveau 21 avril mais bien d’un choix de vote réfléchi.

Ce qui est nouveau dans cette élection c’est que le « danger » du Front National comme première force politique à cette élection et martelée par les médias n’a pas fait peur aux électeurs. Ils sont 84% à avoir voté FN pour exprimer leur rejet de l’Europe.

En revanche, peut-on dire qu’il s’agit d’un signal envoyé au gouvernement ? 55% des électeurs déclarent qu’ils n’ont pas tenu compte de la situation française pour se prononcer et seulement 34% en ont fait un enjeu national.

Tout était réuni pour que ce scénario se réalise : une abstention encore trop élevée, une situation économique qui ne s’arrange pas et que certains économistes qualifient de « pire crise depuis 1929 », un gouvernement désavoué malgré l’arrivée de Manuel Valls, et enfin les affaires qui continuent…comme Bygmalion et surtout un FN en plein
relooking et qui lui a su mobiliser son électorat jeune (43%), de catégorie sociale modeste et peu diplômé.

Il ne s’agit pas de faire l’autruche ni même de diaboliser le FN. Il faudra tenir compte de ce résultat pour que les partis traditionnels français opèrent leur mue et débattent sur le fond avec le FN pour espérer le contrer. Il est donc encore trop tôt pour faire un raccourci qui mènerait le FN sur le perron de l’Elysée. Rappelons que le FN fait 1 million de vote en moins que lors de la dernière élection présidentielle.
Ce signal fort envoyé à la classe politique française ne fait pas du FN le premier parti de France, en tout cas, pas encore.

par Frédéric Ganneval,
co-fondateur de Artenice

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