Au campus Sud des Métiers à Nice s’est tenu l’inauguration d’un nouveau lieu éducatif hors du commun. L’École de Production, dans le cadre de la deuxième édition du Spring Tech Industrie, un événement organisé par la Métropole Nice Côte d’Azur. Afin de promouvoir l’innovation et la renaissance industrielle locale.
Dans cette école, pas de programme abstrait, pas de cours magistraux déconnectés de la réalité. Ce sont les jeunes, âgés de 15 à 17 ans, le plus souvent déscolarisés, presque invisibles aux yeux du système éducatif classique qui sont au centre. Dans ces lieux, ils trouvent une seconde chance. « Nous voulons que ces jeunes se sentent chez eux, qu’ils aient le droit à un avenir, à la dignité du travail », affirme Jean-Pierre Dos Santos, président de l’école. Il traduit d’un message clair, cette école n’est pas une dernière chance, c’est une autre voie, concrète et valorisante.
Dans un atelier de 320 m², ces adolescents réalisent de véritables commandes industrielles, encadrés par des maîtres-professionnels. Loin d’une simple simulation pédagogique, ces jeunes produisent pour de vraies entreprises du territoire. Le modèle est clair « faire pour apprendre », une pédagogie soutenue par la Fédération nationale des Écoles de Production, représentée par Élise Dépré. « On apprend un métier en le vivant », insiste-t-elle. Elle ajoute : « on construit ainsi la confiance en soi, brique par brique ».
Des entreprises partenaires, un ancrage local fort
L’école n’est pas un îlot isolé. Elle fonctionne comme une petite entreprise, une start-up industrielle. Les jeunes produisent des pièces, certaines finies, d’autres semi-finies, pour des clients locaux. Par exemple, l’entreprise Ragni spécialisée dans l’aluminium fait partie des premiers partenaires industriels à avoir confié des commandes. Ces collaborations donnent du sens aux apprentissages. Ce que les élèves fabriquent a de suite une utilité.
Marcel Ragni, président de l’UIMM Côte d’Azur et Sud-Corse et figure emblématique de l’industrie locale, n’a pas caché son émotion : « J’ai fui l’école très tôt. Cette école, c’est une revanche pour ceux qui, comme moi, n’étaient pas faits pour les bancs classiques. Grâce à la Chambre de Commerce et de l’Industrie (CCI), ce projet a trouvé un écrin digne de son ambition. »
Jean-Pierre Savarino, président de la CCI Nice Côte d’Azur, parle, d’un « outil structurant et pensé pour rapprocher les jeunes du monde économique ». Pour lui, cette école s’inscrit dans une stratégie plus large de développement industriel et d’insertion professionnelle. « C’est une étape déterminante pour l’emploi des jeunes générations dans les Alpes-Maritimes. »
Un CAP, et surtout une voie d’entrée vers la dignité
À l’issue de deux années de formation, les jeunes obtiennent un CAP électricité. Un diplôme, certes, mais aussi bien souvent un emploi. Le modèle repose sur l’alternance, et les élèves arrivent sur le marché du travail avec de solides bases pratiques. Certains décrochent peuvent directement obtenir un CDI. Le modèle repose sur un financement mixte : l’État, la région, les entreprises partenaires, mais aussi la taxe d’apprentissage jouent un rôle décisif. Le directeur de TotalEnergies, présent a rappelé l’engagement du groupe dans ce modèle éducatif alternatif. « Aujourd’hui, 16 % des jeunes en France sont sans emploi. Si nous voulons inverser la tendance, nous devons investir dans ces structures concrètes, utiles, efficaces. »
TotalEnergies finance ainsi des équipements, l’achat d’outils, mais aussi les ressources humaines nécessaires. L’objectif fixé est ambitieux : 100 écoles en France d’ici 2028, et plus de 2 000 jeunes formés chaque année à travers ce réseau.
L’école hors contrat, mais pas hors système
Bien que hors contrat, cette école n’est pas hors des réalités du monde éducatif. Elle prépare à un diplôme reconnu, selon un cadre pédagogique rigoureux. Jean-Pierre Dos Santos déclare : « ces jeunes viennent de loin. Ce qu’ils accomplissent ici, c’est une prouesse humaine, technique, et collective. Ils ne sont plus invisibles. Ils construisent. Ils avancent. Et nous avançons avec eux. » Un accompagnement personnalisé est mis en place, et même l’administration, souvent perçue comme un frein bénéficie ici de relais. « Monter les dossiers, c’est parfois compliqué. Heureusement, nous avons une aide à l’accompagnement pour cela. Le but est que l’énergie des équipes reste concentrée sur les jeunes », confie un encadrant.
Nice s’inscrit ainsi dans une dynamique plus vaste, celle des Territoires d’Industrie, portée par l’État et les collectivités. Le forum Spring Tech Industrie, qui s’est tenu en parallèle, a rappelé les besoins du tissu industriel local en main-d’œuvre qualifiée. C’est dans cette logique que s’inscrit l’ouverture de cette école. Notamment, répondre à un besoin immédiat tout en construisant une vision sur le long terme.