Ce lundi, au cimetière juif de Nice, une commémoration marquait les 80 ans de la libération d’Auschwitz. Un moment solennel où les intervenants, jeunes et anciens, ont insisté sur l’importance de transmettre la mémoire de la Shoah pour éviter que l’histoire ne se répète.
Pour Maurice Niddam, président du consistoire de Nice, cette journée est empreinte de tristesse et de responsabilité. « Toutes ces images reviennent, celles des catastrophes et de l’extermination massive de la communauté juive. La mémoire vivante des témoins a presque disparu. C’est à nous, témoins des témoins, de garder ce souvenir fort. » Ce devoir de mémoire s’exprime dans les prières quotidiennes, mais aussi dans des moments comme celui-ci, où les générations se rencontrent pour perpétuer l’histoire.
Ce recueillement prend d’autant plus d’importance dans un contexte mondial marqué par des conflits et des tensions croissantes. Selon Mr Niddam, « ne pas transmettre cette mémoire, c’est risquer que les horreurs se reproduisent. »
Les jeunes au cœur de la transmission
Les jeunes étaient présents en nombre à la cérémonie. Mathias, 15 ans, violoniste ayant joué lors de l’événement, témoigne de son rôle : « c’est un moment important, ça permet de se sentir utile. Je m’exprime avec le violon, mais aussi avec ma volonté de transmettre ce devoir de mémoire. Il est très important de ne pas oublier. »
Pour Martine Ouaknine, adjointe au maire déléguée au Devoir de mémoire, « la jeunesse souffre de grandes lacunes en histoire ». Elle insiste sur l’importance d’éduquer les enfants dès le plus jeune âge. « Dans les écoles primaires, nous avons posé des plaques en mémoire des enfants déportés. Leurs enseignants font un travail formidable de préparation. » Ce type d’initiative permet de marquer les esprits et de créer un lien direct entre les jeunes générations et les drames du passé.
Alain Balabanian, représentant du CRIF, abonde dans ce sens : « Les voyages de mémoire, comme ceux à Auschwitz, sont essentiels. Les cours d’histoire doivent expliquer clairement ce qui s’est passé. Il faut aussi utiliser les réseaux sociaux de façon positive pour toucher les jeunes. »
Les chiffres et initiatives locales
À Nice, la communauté juive a payé un lourd tribut pendant la Seconde Guerre mondiale. Environ 2 500 Juifs ont été déportés depuis les Alpes-Maritimes, selon le Mémorial de la Shoah, dont une grande partie depuis Nice. Peu ont survécu.
Pour perpétuer la mémoire, des initiatives comme la « Marche des Vivants » sont organisées pour les lycéens. Ces voyages éducatifs marquent les esprits. À cela s’ajoutent des cours d’histoire dédiés à la Shoah dans les écoles, où des textes d’Auschwitz et des récits de résistants sont étudiés.
Selon une étude de 2020 (Ifop), 85 % des Français âgés de 18 à 24 ans savent ce que représente Auschwitz. Un chiffre encourageant mais qui rappelle que la transmission reste un défi.
Un défi face à l’oubli
Pour le rabbin et professeur Ilan Drai, l’éducation est le pilier de la transmission : « il faut connaître le passé pour avancer et s’assurer que cela ne se reproduise pas. L’école joue un rôle central, avec des voyages à Auschwitz et des projets comme la Marche des Vivants. »
Les intervenants partagent également une vigilance face à l’antisémitisme croissant. Mr Balabanian alerte : « il y a une très forte augmentation des actes antisémites en France. Nos écoles, nos synagogues, nos lieux de culte sont surveillés. Nous devons rester vigilants. »
Les commémorations comme celle au cimetière juif de Nice ne sont pas seulement des hommages. Elles sont des ponts entre les générations, un moment pour transmettre l’histoire à ceux qui construiront l’avenir. Comme le souligne Mathias : « Transmettre, c’est aussi une tradition. Cela ne doit jamais s’éteindre. » Avec ses initiatives locales et sa forte implication, la ville de Nice montre que la mémoire peut perdurer, même 80 ans après Auschwitz.