Le film de Jafar Panahi, récompensé au dernier Festival de Cannes, sortira en salles le 1er octobre 2025. La bande-annonce annonce un récit à la fois intime et politique.
Le Festival de Cannes 2025 avait marqué un moment rare : le retour de Jafar Panahi sur la Croisette. Le cinéaste iranien, longtemps empêché de voyager, commandé à de la prison pour propagande dans son pays d’origine, recevait enfin en personne la Palme d’or pour Un simple accident. Trois mois plus tard, le film se montre au public à travers une bande-annonce qui en fixe le ton.
La vidéo s’ouvre sur une camionnette arrêtée dans le désert. À l’arrière, un homme tente de tirer un corps hors du coffre. Le spectateur découvre Vahid, persuadé d’avoir retrouvé son ancien bourreau. « Tu te souviens de ce que tu m’as fait, ordure ? », lance-t-il, en essayant d’enterrer vivant celui qu’il croit reconnaître. L’homme, prénommé Eghbal, nie avec fermeté. Père de famille, il affirme n’avoir jamais croisé Vahid. Dès lors, le doute s’installe : et si ce n’était pas lui ?
Le film explore ce glissement entre certitude et incertitude. Vahid se débat avec ses souvenirs, sa colère et le besoin de justice. Le récit entraîne aussi d’autres personnages dans cette quête : une jeune femme qui photographie les scènes, un futur marié, un colosse emporté par la rage. Tous gravitent autour d’un même homme, dont l’identité reste en suspens.
Le point de départ semble banal. Un chien est écrasé par une voiture dans la périphérie de Téhéran. Le véhicule tombe en panne et la famille qui voyageait à bord cherche de l’aide. Cette parenthèse conduit Vahid à croiser l’homme qu’il croit être « La guibole », un ancien gardien de prison. Il ne l’a pas vu depuis des années, mais il pense reconnaître sa démarche. Dès lors, tout bascule. L’accident, en apparence sans conséquence, devient le déclencheur d’un engrenage de suspicion et de violence.
Tourné clandestinement, le film se déploie entre routes poussiéreuses, ruelles étroites et arrêts forcés. Chaque scène fait surgir une question morale : jusqu’où aller pour obtenir réparation ? Comment distinguer vengeance et justice ?
Un cinéaste toujours sous surveillance
La Palme d’or décernée à Un simple accident a aussi une portée politique. Jafar Panahi a déjà payé cher son opposition au régime iranien. En 2022, il avait été condamné pour « propagande » et incarcéré. Il n’avait retrouvé la liberté qu’après une grève de la faim. Exilé en Australie depuis 2025, il répète qu’il souhaite retourner un jour en Iran, quitte à être de nouveau emprisonné.
Son cinéma a souvent pris la forme de huis clos. Taxi Téhéran l’avait montré assis derrière un volant, filmant ses passagers dans la capitale. Avec Un simple accident, le van de Vahid devient à la fois abri et piège. Un espace réduit où s’affrontent mémoire, peur et désir de justice.
Le réalisateur ne disposait d’aucun financement iranien. Le tournage s’est déroulé en marge des circuits officiels, avec des acteurs qui connaissent bien la censure. Vahid Mobasseri, déjà remarqué dans Aucun ours, incarne le personnage principal. À ses côtés, Maryam Afshari et Ebrahim Azizi complètent le casting.
À Cannes, le jury présidé par Juliette Binoche avait salué un film « d’une intensité particulière. » L’actrice Nadia Melliti avait été récompensée par le prix d’interprétation féminine pour un autre long-métrage, La Petite Dernière. Robert De Niro et Denzel Washington avaient reçu une Palme d’honneur. Mais la soirée avait surtout mis en avant Panahi, accueilli longuement par les applaudissements.
Une sortie attendue
Le film sortira en salles le 1er octobre 2025, dans toute la France. Les premières images diffusées cette semaine donnent déjà un aperçu de son ton. Le mélange de comédie, de drame et de politique y apparaît clairement. La bande-annonce montre un pays traversé par des tensions, mais aussi des individus qui doutent, se trompent, se confrontent à leurs propres limites.
« Même après l’avoir fébrilement filé, puis enlevé, trimbalé dans son van et presque enterré vivant, Vahid continue à douter. » Cette phrase, entendue dans les extraits, résume l’état de confusion qui traverse le film. À chaque étape, le spectateur est invité à se demander : qui est vraiment cet homme, et jusqu’où peut aller la quête de justice ?
Avec Un simple accident, Panahi poursuit une œuvre façonnée par la contrainte. Ses films interrogent la vie sous un régime autoritaire, mais aussi les réactions humaines face à la peur et au doute. La sortie française marquera sans doute un moment important pour les spectateurs curieux de découvrir un cinéma engagé, mais aussi profondément ancré dans le quotidien.