Les paquebots de plus de trois mille personnes seront limités à un seul par jour dans la baie de Cannes, à partir de 2026. Bien que l’objectif de cette mesure soit d’abord d’ordre écologique, les habitants et commerçants sont très divisés sur la question.
Dès l’année prochaine, un seul paquebot de plus de 3 000 personnes par jour sera autorisé dans la baie de Cannes. C’est la mesure prise par David Lisnard, le maire de Cannes, le 27 juin dernier. Le nombre d’escales de bateaux devrait baisser de près de 50%, avec une jauge de six mille croisiéristes maximum par jour. Trente-quatre escales sont prévues en 2026 puis trente et une en 2027. Une mesure environnementale qui intervient après des décisions similaires prises par Christian Estrosi et quelques semaines après l’UNOC. Pour les habitants et commerçants, cette mesure à du bon, et du mauvais.
Une mesure bien accueillie
“Oui c’est bien, je n’aimais franchement pas voir ces gros bateaux depuis le port. Dans mon appartement, j’ai une vue sur la mer et ce n’était pas beau de voir ces immenses navires, alors je suis contente”, explique Jacqueline, soixante et onze ans. Avec cette mesure visant à limiter les gros paquebots de croisière à un par jour dans la baie de Cannes, la retraitée espère retrouver du calme sur le port. “Je viens souvent prendre le café avec des amis mais quand il y a des touristes qui débarquent d’un coup, c’est trop. Il y a du bruit, trop de monde”, renchérit-elle.
Si les retraités sont pour la plupart heureux de la décision de leur maire David Lisnard, les plus jeunes le sont aussi. Pour Bastien, étudiant de vingt et un ans, cette décision est un pas de plus en faveur d’un monde plus respectueux de l’environnement. “Nice a déjà eu une décision similaire, la ville a accueilli l’UNOC il y a quelques semaines. C’est bien qu’aujourd’hui, ce soit Cannes qui suive le mouvement. Quand on voit l’état de la mer et des plages, je suis très content, bien sûr que c’est une bonne décision”, explique-t-il.
Pour rappel, Christian Estrosi a fait de la lutte contre les navires de croisière l’un de ses combats majeurs. Il a notamment décidé, il y a plusieurs mois, d’interdire les paquebots de plus de 2500 passagers dans la rade de Villefranche-sur-Mer. Il est d’ailleurs parti à l’abordage de l’un d’entre eux jeudi 3 juillet pour tenter de le faire partir. En vain.
Une perte majeure pour certains
Cette limitation des paquebots à Cannes n’est pas bien vue par tout le monde. C’est en particulier le cas chez les commerçants. Face à un afflux réduit de croisiéristes, certains y voient un gros frein pour leur chiffre d’affaires.
“Cette mesure, c’est une perte énorme pour nous c’est certain. Ces bateaux, c’est la majorité de notre clientèle, la très grande majorité. On est contre la mesure parce qu’elle va vraiment nous affecter. C’est surtout le navire Epic, avec qui on faisait un gros chiffre. Beaucoup d’Américains qui venaient. C’est dur”, explique la gérante de la boutique de souvenirs “French Kiss”, en plein cœur du port de Cannes.
Pour les restaurateurs, le constat est similaire. Le gérant d’un restaurant sur le port, qui a souhaité garder l’anonymat, explique comment cette mesure va l’affecter. “Nous, on est en service continu. Les touristes les plus aisés et les Français, ne viennent pas manger à n’importe quelle heure, ils viennent le midi et le soir. Les croisiéristes, en fonction de l’heure à laquelle ils débarquent, sont susceptibles de venir dans l’après-midi. C’était le constat que l’on faisait et c’est pour cela qu’on était en service continu, parce qu’avec ces touristes, cela fonctionnait pas mal. Maintenant, avec cette mesure, je me pose des questions. Est-ce que cela va valoir le coup que l’on reste ouvert tout le temps”, témoigne-t-il.
Un manque à gagner important pour les commerçants et restaurateurs. Pour rappel, en 2024, la baie de Cannes a accueilli 175 escales et plus de 460 000 croisiéristes. Un chiffre qui va drastiquement diminuer dans les années à venir puisque d’ici 2030, la ville veut interdire l’accueil de navires de plus de 1 300 passagers.
D’autres commerçants heureux
Pour certains commerçants, cette limitation est une bonne nouvelle. Alexandre Thomas, caviste du centre-ville, espère un flux moindre pour de meilleures ventes. “Le souci, ce ne sont pas tant les navires de croisières, c’est le flux de gens que cela engendre. Et parfois pour nous, c’est du passage pour rien. On peut avoir des achats, mais pas de la part de tout le monde”, explique-t-il.
“Je préfère les plus petits bateaux, avec des gens qui vont venir prendre le temps d’acheter une belle bouteille. Les croisiéristes ne prennent pas forcément le temps de faire nos boutiques”, témoigne-t-il ensuite.
Le caviste espère aussi que cette mesure permettra de désengorger les rues du centre-ville durant l’été. Lorsque les allées sont bondées, il est difficile pour certains d’entrer dans les boutiques. “Les gens qui veulent venir chez nous n’auront peut-être plus tout ce monde dans la rue pour circuler. Cela va redonner un peu de clarté à la ville et redorer son image. Et c’est une belle mesure environnementale donc je suis personnellement content”, a conclu Alexandre Thomas.
La limitation des paquebots transportant plus de 3 000 personnes : un constat mi-figue, mi-raisin pour la population cannoise. N’en reste pas moins que cette mesure constitue une avancée écologique importante pour la protection des océans, au cœur d’une année 2025 sous le signe de la mer.