La fronde s’amplifie à la Métropole Nice Côte d’Azur contre la protection fonctionnelle de Christian Estrosi

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Vingt élus métropolitains, dont dix-sept maires, contestent la prise en charge par la collectivité des frais d’avocat de Christian Estrosi dans sa plainte pour diffamation contre Éric Ciotti. Une opposition qui révèle les fractures politiques au sein de la Métropole Nice Côte d’Azur, à quelques mois des élections municipales.

Le sujet divise profondément les élus de la Métropole Nice Côte d’Azur. Une semaine après le vote du conseil métropolitain du 22 octobre, la contestation s’organise autour d’un communiqué signé par vingt élus, dont dix-sept maires. Tous expriment leur refus de voir la collectivité financer les frais de justice de Christian Estrosi, président de la Métropole, dans sa plainte pour diffamation contre son adversaire politique Éric Ciotti.

Lors du conseil, le débat avait duré près d’une heure. La question posée était claire : la protection fonctionnelle de Christian Estrosi est-elle légitime dans cette affaire ? Le maire Horizons de Nice a porté plainte pour diffamation le 17 novembre 2023 contre Éric Ciotti, à la suite de propos publiés dans Nice-Matin le 31 octobre 2023. Le député UDR y mettait en cause sa gestion des vallées après la tempête Alex. Le procès doit être jugé au fond le 27 mars 2026, soit une semaine après le second tour des municipales.

La protection fonctionnelle, accordée de plein droit le 5 juillet 2025, permet à un élu de voir ses frais d’avocat pris en charge par la collectivité lorsqu’il est attaqué pour des faits liés à l’exercice de son mandat. Mais plusieurs élus estiment que cette affaire relève d’un différend politique personnel.

“Alors que les habitants font face à des contraintes budgétaires fortes, alors que la métropole n’a eu de cesse que d’accroître la pression fiscale sur ses contribuables, il leur paraît inconcevable que les ressources publiques soient mobilisées à des fins politiciennes très éloignées de la notion d’intérêt général”, écrivent les vingt signataires dans leur communiqué du 27 octobre 2025.

Cette opposition n’est pas anodine. Elle émane d’un tiers des maires du territoire métropolitain, parmi lesquels figurent des élus proches d’Éric Ciotti, mais aussi quelques indépendants et sans étiquette. Certains s’étaient abstenus lors du vote, avant de durcir leur position dans les jours suivants.

Entre loyauté politique et indépendance affichée

Le débat sur la légitimité de la protection fonctionnelle a mis en lumière les tensions entre les deux camps qui se livrent déjà bataille pour la mairie de Nice. Cinq jours après le conseil, plusieurs maires estiment qu’il faut marquer leur désaccord. Xavier Beck, maire (UDR) de Cap d’Ail, se place en première ligne. “La protection fonctionnelle, je l’ai mise en place pour protéger des fonctionnaires, des policiers victimes d’actes de violence. C’était tout à fait normal. Mais le débat démocratique, il faut en accepter le jeu (…) sinon on va se retrouver devant le tribunal toutes les semaines”, déclare-t-il.

Le maire de Carros, Yannick Bernard, pourtant abstentionniste le 22 octobre, juge désormais la décision “tout à fait inopportune. Moi quand j’ai besoin de rallonges de budget de quelques dizaines de milliers d’euros, on me dit non. Je préférerais que l’argent de la Métropole aille aux routes de ma commune plutôt que dans des actions qui ne me semblent pas légitimes.”

Même prudence à Venanson. Loetitia Loré, maire sans étiquette et membre de l’UDR, dénonce un manque d’informations sur les dépenses engagées. “On n’arrive pas à avoir le montant total des frais d’avocat. Nous n’avons pas eu de réponse en conseil métropolitain. La collectivité va-t-elle devoir payer la totalité de la procédure ? S’agit-il d’un forfait ? Il n’y a pas de transparence.”

À l’inverse, les soutiens de Christian Estrosi défendent une décision conforme au droit et à la protection des élus face aux attaques publiques. Philippe Pradal, vice-président (Horizons) de la Métropole, souligne la gravité des propos d’Éric Ciotti. “Je sais bien que le débat démocratique conduit à l’excès parfois, mais on parle de mise en danger délibéré. Si les mots ont un sens, ces propos sont extrêmement graves. Et on voudrait que Christian Estrosi ne se défende pas.”

Des accusations d’ingérence et une bataille politique en toile de fond

Pour les proches de Christian Estrosi, cette contestation traduit surtout une manœuvre politique orchestrée par son rival. Dans un communiqué, la Métropole affirme : “en dépit des tentatives d’ingérence d’Éric Ciotti à l’égard des maires de la Métropole – qui ont leur libre arbitre – la protection fonctionnelle accordée à Christian Estrosi a été adoptée par 102 élus sur les 133 membres élus.”

Le camp Estrosi insiste sur la légalité du vote et sur le fait que le président avait quitté la salle lors du débat pour ne pas être juge et partie. Les opposants, eux, dénoncent un usage inapproprié des fonds publics dans un contexte politique tendu.

Le duel entre Christian Estrosi et Éric Ciotti dépasse ainsi le cadre juridique. Il s’inscrit dans une rivalité ancienne qui structure désormais la vie politique niçoise. À mesure que l’échéance municipale approche, chaque affrontement devient un marqueur de loyauté ou d’indépendance pour les maires du territoire.

Le 27 mars 2026, le tribunal devra trancher la plainte pour diffamation. Une date symbolique : elle intervient une semaine après le second tour des élections municipales. Reste à savoir qui, de Christian Estrosi ou d’Éric Ciotti, siègera alors dans le fauteuil de maire de Nice.

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