

C’est probablement inspirée par cette philosophie que la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche Valérie Pécresse a récemment annoncé le lancement d’un plan doté d’un montant cumulé de 730 millions d’euros sur cinq ans et destiné à redéfinir le cahier des charges du contenu de la Licence universitaire.
A lire le document d’orientation intitulé « Plan pluriannuel pour la réussite en Licence », on comprend qu’il s’agit véritablement de renforcer la « professionnalisation » de ce diplôme au travers de trois axes applicables dès la première année : « savoirs fondamentaux » où réapparaît la mise en valeur des « compétences » et pas seulement celle des connaissances en vue de « lutter contre les inégalités sociales ». Diffusion, ensuite, d’une méthodologie de travail, notamment celle dont le défaut se fait sentir dans les matières « d’expression écrite et de communication orale ». Assurance, enfin, d’un « encadrement », souhaité explicitement par de nombreux étudiants, au besoin par le biais d’un suivi, voire d’un « tutorat » pour ceux le plus en difficulté. Tout un système que les IUT, placés par la Ministre au cœur d’un dispositif rénové et assoupli de passerelles entre études générales et plus professionnelles, connaissent bien depuis trois ans : celui d’accompagner par une « orientation active », l’étudiant dans son « projet professionnel et personnalisé ». Autant de bouleversements peut-être encore plus essentiels que la Loi sur l’autonomie des Universités. La Ministre semble l’avoir compris : les changements dans le fonctionnement au quotidien et qui reposent sur les humains pèsent parfois davantage qu’une grande et ambitieuse réforme.
De même que l’individu, dans les nouvelles conditions de travail, retrouve progressivement la prééminence au sein de l’entreprise, l’étudiant, dans ce programme, revient effectivement au premier plan des préoccupations universitaires. Sinon pour quelle raisons la Ministre évoquerait-elle « le coût humain et socio-économique » des 52% d’étudiants qui échouent en fin de première année ? Et d’insister sur le fait que les licenciés professionnels trouvent un emploi dans les mois qui suivent leur formation. C’est bien le moindre lorsqu’on sait aujourd’hui, qu’un salarié d’entreprise place presque à égalité le salaire reçu et la « reconnaissance » induite par son labeur. La mobilité facilitée entre filières courtes « professionnalisantes » et filières plus générales de l’université s’inscrit dans une même perspective : en suivant un étudiant tout au long de son cursus, les professeurs ne manquent pas d’enregistrer les mutations fondamentales de jeunes, précisément à cette période de post-adolescence où pour eux, tout est tentative, expérimentation et tâtonnement. Elèves qui se découvrent ou se confirment une passion, modifient leurs priorités et développent des facultés qui leur permettent de reprendre un parcours plus ambitieux.
Quant à ceux qui s’inquiètent des conséquences d’une mainmise des entreprises sur l’Université, notamment au prix d’une dévaluation des matières non scientifiques, qu’ils se rassurent : les institutions financières de la City recrutent encore fréquemment des historiens ou des philosophes !
