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5 mai 2024

L’Edito du Psy – Liban : l’impuissance française

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bobine-56.jpgCe n’est pourtant pas faute d’avoir été mise en garde. En particulier par les Américains. Et quelques amis saoudiens. Mais vendredi soir à 00h00, la diplomatie française a dû se résigner et admettre qu’elle avait bel et bien été piégée au Liban. Et par ceux-là même dont elle a cherché à obtenir a minima une bienveillante neutralité. Le tempo des négociations avec Damas, discrètes dans un premier temps, avec une étonnante précipitation ensuite, annonçait déjà les effets d’un mécanisme qui allait vider de toute substance l’action de la France. A l’accoutumée, la Syrie s’est habilement joué de la naïveté française de vouloir lui accorder, encore et toujours, une parcelle de confiance qu’une impressionnante accumulation de terribles méfaits lui interdit pourtant de mériter. « Nous ne risquons rien en dialoguant avec la Syrie » avait-t-on officiellement estimé à l’Elysée.

Certes, on ne saurait reprocher à Paris de s’être considérablement investi dans le dossier libanais. Démarche historiquement et affectivement justifiée. Mais on ne peut manquer de s’interroger sur la philosophie et les conditions de la mise en œuvre de sa stratégie. Espérer parvenir à découpler la Syrie de l’Iran, quitte à faire miroiter à Damas les retombées de la manne européenne pour un pays au bord de l’asphyxie économique, est révélateur d’un tropisme occidental sur le concept de bien-être, passablement ignoré par le régime syrien. Et par surcroît oublieux des sentiments de revanche qui animent Bachar El Assad : en premier lieu à l’égard de la France, un des pays qui l’a contraint à sortir du Liban en 2005 et vis-à-vis des Libanais dont il veut faire payer au prix fort l’acquisition de leur indépendance. On peut, circonstances atténuantes, comprendre les inquiétudes de Paris à la lecture de la récente lettre du président Ahmadinejad envoyée à son homologue français. Les « menaces à peine voilées » qu’elle contient, s’adressent peut-être aux soldats français engagés dans la Finul. Inutile d’être extralucide pour saisir le sens du rappel adressé aux autorités politiques françaises par la missive iranienne sur les « intérêts communs de la France et de l’Iran au Liban ». Surtout si l’on prend en considération les paroles prononcées dans ce contexte par le vice-ministre iranien des affaires étrangères, sur le fait qu’au Liban, « le Hezbollah est celui qui assure la sécurité des forces des Nations unies ».

Toujours est-il qu’en dépit de l’optimisme – bien solitaire – de Bernard Kouchner sur les « développements satisfaisants » attendus dans les prochains jours et la très hypothétique nomination – évoquée à Paris mais pas à Beyrouth – du Commandant en chef de l’Armée Michel Sleiman à la présidence, le coup est rude pour une diplomatie française soucieuse de retrouver une présence aussi active qu’originale au Moyen-Orient en s’efforçant notamment de rendre attractif le projet d’Union méditerranéenne lancé dernièrement par le Président Sarkozy.
De nombreux Libanais, de tout bord confessionnel, ont été passablement irrités par les discours aux tonalités de donneur de leçon du Ministre français des affaires étrangères. Sans parler du mécontentement du Patriarche des Maronites, le cardinal Sfeir, obligé par la France de fournir contre son avis une liste de candidats présidentiels dont il avait prédit le peu de cas qu’en feraient des manœuvres politiciennes dans un pays comme celui du Cèdre aux influences aussi multiples que changeantes. Dans ce chaos politique, les Libanais trouvent pourtant deux motifs temporaires de satisfaction : le départ d’un président complètement inféodé à la Syrie et une « vraie fausse » déclaration d’état d’urgence dont la dramatisation a déjà fait long feu sur le terrain : le dispositif de l’armée est, selon les habitants de Beyrouth, moins impressionnant que lors des derniers jours et le nombre de blindés, de jeeps et de soldats paraît diminuer progressivement.

Tout en restant fidèle à sa tradition de dialogue, la France a néanmoins donné le sentiment, contrairement aux Américains dont elle se déclare désormais proche, de ne pas avoir su choisir son camp sur le fond. En prenant l’initiative de solliciter Damas, Paris a simultanément distillé le doute sur un possible basculement de sa diplomatie vers une « realpolitik » et s’est aliéné une large frange de Libanais dans lesquels elle puisait un soutien traditionnel. « Rien avant Annapolis » entend-t-on désormais dans les chancelleries. Même si elle porte essentiellement sur la question israélo-palestinienne, la conférence du 27 novembre prochain dans l’Etat du Maryland, où prendra place un représentant officiel du Liban en dépit de l’opposition du Hezbollah, ne pourra pas ne pas évoquer la situation politique au Pays du Cèdre. Une fois de plus, tous les regards se tourneront vers la Syrie…et les Etats-Unis. Sans valeur ajoutée française.

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