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2 mai 2024

L’Edito du Psy – Afghanistan: des photos en attendant des mots.

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jpg_jpg_bobine2008-19.jpg Les photos publiées par l’hebdomadaire Paris-Match montrant des Talibans qui portaient des uniformes de soldats français tués au combat ont nourri une polémique sur la stratégie de la France en Afghanistan. Elles ont par surcroît provoqué l’indignation – compréhensible – des familles de ceux qui sont dramatiquement morts en faisant leur devoir.

Mais elles ont également eu pour conséquence de réveiller en quelque sorte l’opinion publique sur la nature et les évolutions de notre engagement dans un pays étranger et lointain. Ce qui apparaissait pour beaucoup comme une énième opération de maintien de la paix sous les couleurs onusiennes est subitement devenue une situation de guerre. Le problème réside dans le fait que les images ont précédé des mots qui n’avaient pas encore – ou avec vive réticence – été prononcés. Après tout, dans un autre conflit impliquant l’hexagone, il aura fallu plus de vingt ans pour que soit reconnue la dénomination de « guerre » pour des opérations françaises pudiquement nommées jusqu’alors « de maintien de l’ordre ».

Au-delà de la douleur légitime due à toute perte de vies humaines, ce tragique événement d’Afghanistan aurait engendré des réactions différentes si les responsables politiques avaient manifesté la volonté d’expliciter dès l’origine les risques inhérents au changement du positionnement français sur le terrain : au départ plus en retrait, à l’instar des soldats de la Bundeswehr que Berlin, pour des raisons qui ne sont peut-être plus seulement historiques, a toujours refusé d’envoyer dans les zones dangereuses, les forces françaises ont été par la suite nettement plus exposées aux côtés des armées canadiennes et américaines.

Lorsque Nicolas Sarkozy – avec raison – explique à Kaboul que la bataille pour les valeurs de la démocratie commence en Afghanistan, ses paroles pour aussi fondées qu’elles soient, perdent néanmoins de leur valeur pour être perçues comme liées aux circonstances. Si ces propos avaient été tenus dès le début de l’engagement avec l’énoncé clair des dangers encourus, la conscience nationale eût appréhendé autrement le malheur qui frappe et endeuille aujourd’hui des familles françaises. Gageons même que la compassion n’en eût été que plus solidaire.

Mais le monde occidental se plaît désormais à se présenter de manière aseptisée, propre, avec la mise sous le boisseau des nouvelles alarmantes, désagréables ou politiquement délicates. Même avec des moyens sophistiqués, des frappes chirurgicales, des satellites et des drones, la guerre fera toujours des morts.

L’appel lancé à « l’unité du pays dans la lutte contre le terrorisme » par le Ministre de la défense et adressé aux journalistes et aux professionnels de l’information ne se situe-t-il pas dans ces conditions à contre-emploi ? Alors que les Talibans misent sur la portée des images pour affaiblir la cohésion des troupes sur le terrain et créer l’embarras politique de Paris, n’est-ce pas plutôt la peur de dire qui joue en faveur de leur stratégie ? En leur opposant une transparence de l’information, aussi douloureuse soit-elle, les responsables politiques désamorceront davantage la charge des abjectes révélations de l’ennemi qu’en conservant un silence gêné. Le pire serait que les Talibans puissent apparaître comme les seuls à se montrer capables de mourir pour des idéaux et une façon de vivre.

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