Disponible quelques jours gratuitement sur YouTube, un documentaire d’Arte revient sur la construction de l’image de Nice, ville façonnée par le regard des artistes autant que par le tourisme.
Nice. Derrière ses façades colorées et sa baie, elle ne se résume pas à une carte postale. Le documentaire réalisé par Thierry Thomas, Nice, les Artistes et l’Azur, propose d’en revisiter l’histoire et l’identité à travers les images, les archives et les mots de ceux qui l’ont contemplée. Le film, d’une durée de 53 minutes, est diffusé sur Arte et mis en ligne temporairement sur YouTube.
La ville est présentée comme un lieu paradoxal. Elle évoque pour certains un espace fermé, réservé, presque exclusif. Mais son histoire révèle un tout autre visage. Avant son rattachement à la France en 1860, Nice appartenait au Piémont. Cette singularité historique a marqué son identité. L’influence italienne reste visible, tout comme celle des Anglais et des Russes, venus y bâtir leurs villas au XIXe siècle.
Ce passé de résidence privilégiée a fait naître le tourisme de masse. Mais il a aussi nourri un imaginaire artistique. Des écrivains et des peintres s’y sont arrêtés, fascinés par la lumière et la mer. La baie des Anges a ainsi offert matière à réflexion et inspiration. Nietzsche, séjournant à Nice, y a formulé une partie de sa pensée. Claude Monet y voyait une palette impossible à saisir sans « diamants et pierreries ».
Henri Matisse, arrivé en 1916, choisit d’y vivre jusqu’à sa mort. Il en fit son ancrage. D’autres artistes, comme Bonnard, Picasso ou Renoir, y ont travaillé ou séjourné. Tous ont contribué à construire une image de Nice qui dépasse le réel.
Le documentaire ne se limite pas à cette mémoire. Il donne aussi la parole à des créateurs contemporains, tels qu’Ernest Pignon-Ernest ou Chantal Thomas. Leurs témoignages dialoguent avec ceux du passé et permettent de relier la ville d’hier à celle d’aujourd’hui.
Une Côte d’Azur façonnée par l’imaginaire
La question centrale du film est simple : qu’est-ce qui définit l’identité d’un lieu ? Le documentaire avance une réponse : ce sont les regards qui se posent sur lui. Nice, plus que d’autres villes, en offre un exemple. Son image a été construite à travers une histoire faite de désirs et de projections.
Depuis le XIXe siècle, la Côte d’Azur a été remodelée selon les besoins de ceux qui la fréquentaient. Touristes, peintres, écrivains : tous ont participé à cette métamorphose. Le documentaire montre que cette transformation est le fruit d’un « amour-Pygmalion ». L’endroit a été façonné, rêvé, réinventé sans cesse.
Les images d’archives croisent celles d’aujourd’hui. Le film navigue entre le passé et le présent, entre souvenirs et réalité actuelle. La lumière, élément central de l’œuvre, sert de fil conducteur. Elle est l’élément qui relie les artistes entre eux, comme un langage commun.
À travers cette approche, le documentaire ne propose pas un récit figé. Il invite plutôt à observer la manière dont un imaginaire collectif a pris forme. Nice devient ainsi un miroir. Elle reflète à la fois une histoire locale et des représentations plus larges, qui dépassent la ville pour toucher à l’idée même de la Méditerranée.
Ce travail ne se limite pas à la peinture ou à la littérature. Il inclut aussi le cinéma, avec des références à Jean Vigo ou à Francis Scott Fitzgerald, qui a puisé dans l’ambiance de la Côte d’Azur. Chaque création, chaque regard, contribue à enrichir un portrait multiple.
En filigrane, le documentaire interroge notre rapport aux lieux que nous habitons ou que nous visitons. Qu’y voyons-nous ? Que projetons-nous ? Et que reste-t-il, une fois les illusions dissipées ?
En offrant ce mélange de mémoire, d’art et d’histoire sociale, le film permet de mieux comprendre comment une ville peut être inventée et réinventée par ceux qui la vivent ou la traversent. Nice n’apparaît pas seulement comme un décor. Elle devient un récit collectif, toujours en mouvement.
Le documentaire Nice, les Artistes et l’Azur est disponible en replay sur Arte et sur YouTube pour une durée limitée.
