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4 mai 2024

Racisme :Toi, tu rentres. Toi, tu rentres pas…

Lorsqu’ils arrivent enfin devant le sympathique et accueillant physionomiste, celui-ci les laisse tous passer … sauf Samy. Après deux secondes de réflexion, il explique : « Désolé mais ici, on ne laisse entrer que les femmes de plus de 25 ans et les hommes de 30 ans ». Inutile de préciser que beaucoup, dans la file, n’atteignent pas cet âge réglementaire. Seul Samy, 25 ans, a été épinglé.

« Celle-là, on me l’avait encore jamais faite ! Pourtant, j’en ai entendu des excuses. Une fois, on m’a même sorti que ma coupe de cheveux n’était pas réglementaire ». Samy quitte les lieux sans dire un mot pendant que ses amis s’expliquent avec le physionomiste. « Ça ne sert à rien de parler avec ces gens. Il n’y avait aucune raison que je me fasse refouler mais ils trouvent toujours des excuses bidons. Je comprends les jeunes de 18/ 19 ans qui ont la rage. Maintenant, avec le recul, je m’en fous. Mais je réfléchis à deux fois avant de sortir en boîte ».

Samy s’éloigne calmement et fièrement mais il est touché dans sa chair.

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Cette histoire, des milliers d’immigrés ou de Français à la peau sombre la vivent tous les week-ends. Et la Côte d’Azur n’est malheureusement pas épargnée par ces actes de discrimination.

« Juan-les-Pins est peut-être la ville où il est le plus difficile de rentrer dans un établissement de nuit quand on n’est pas blanc », affirme Pierre Ayi. Ce jeune Niçois d’origine togolaise estime à 20%, en proportion, le nombre de fois où il s’est vu refuser l’entrée en boîte de nuit. D’autres penchent plutôt pour le 50%. Les raisons sont aussi diverses et variées que « on est plein », « il faut être accompagné » ou « c’est pour les habitués ». « Mais à chaque fois, on sent bien que c’est pour notre couleur de peau » ajoute Pierre.

Certains agissent contre le phénomène. Mamadou Thioye est bénévole au comité de Nice de SOS Racisme. « L’argument des gérants d’établissements de nuit est de dire que les blacks et arabes ne viennent que pour mettre la pagaille. Ce n’est pas du tout justifié ». Mamadou continue à se battre contre les préjugés, même s’il reste très pessimiste quant à la situation. « Ça ne s’arrange pas. Les interlocuteurs des établissements de nuit font partie d’une catégorie qui ne cherche pas à dialoguer ou à comprendre ».

D’autant plus que les risques encourus, s’il y a procès, ne font pas vraiment peur aux auteurs de ces discriminations. Les peines peuvent tout de même aller jusqu’à 2 ans de prison et 45 000 euros d’amende. Encore faut-il que l’affaire ne soit pas classée sans suite. « Concernant les discriminations, on traîne les pieds dans certaines régions, assure Martial, bénévole de SOS Racisme au siège national, à Paris. Notamment à Montpellier, Marseille ou Nice où il est plus difficile qu’ailleurs de poursuivre en justice les contrevenants ».

La difficulté : obtenir les preuves nécessaires pour l’action en justice. C’est pour cela que SOS Racisme a mis au point la méthode de « testing ». Afin d’éviter les classements sans suite. La méthode ? L’association envoie plusieurs couples, habillés de la même façon mais à l’épiderme différent, devant les mêmes boîtes. Le week-end dernier, les testing, organisés au niveau national, se sont révélés positifs (façon de parler) dans six villes : Bordeaux, Châlons-en-Champagne, Toulouse, Angers, Lyon et Paris. Pour les Alpes-Maritimes, un testing sera bientôt réalisé à Nice, Cannes et Antibes en fonction des plaintes déjà reçues. Le Baoli à Cannes, déjà sous le coup d’une plainte de l’association, devrait en (re)prendre pour son grade.

SOS Racisme vient de publier son rapport annuel. Au niveau national, 800 lettres, 3500 mails et 1000 appels ont été reçus par l’association. 396 procès ont été mis en route et 107 victoires judiciaires ont été obtenues. « Nous sommes satisfaits, déclare Martial, car les amendes sont de plus en plus importantes et les peines sont de plus en plus souvent accompagnées de prison avec sursis ». Et de conclure : « Désormais, les gens se bougent. Ils ne se laissent plus faire ».

Avis aux gentils videurs de discothèques.

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