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22 avril 2024

Quid du Sang Neuf à Nice ?

La lumière a été récemment, et à nouveau, faite sur ce projet qui devait être un événement majeur de la politique culturelle de la nouvelle municipalité au moment de son annonce en 2008.


109.jpg ( ndlr) La mission de cette réalisation fut confiée à Sophie Duez, ancienne actrice et conseillère municipale PS avant de démissionner et d’être nommée dans la foulée au cabinet du nouveau (à l’époque) Maire de Nice, Christian Estrosi.

En son temps, le fait provoqua de nombreuses polémiques et fit couler beaucoup d’encre quant aux effectives raisons de cette pirouette politico-idéologique de Sophie Duez : Ambition personnelle ? Poste alimentaire ? on en vint même à quelques ragots inopportuns. Peu importe.

Quatre ans sont passés depuis et… le projet est toujours au stade embryonnaire. La question se pose donc de façon légitime quant aux raisons, chacun y va de sa réponse et de ses motivations. Un peu de lumière à ce sujet ne pourra qu’être utile.

Nice Premium réagit à ce sujet avec trois articles qui veulent être un compendium traitant la situation des centres culturels comme celui du Sang-Neuf et de la politique culturelle de la Ville.

Quant à Sophie Duez, la lecture de ses différentes déclarations laissent quelque peu désorienté : « … C’est comme si j’écrivais un spectacle pour ma ville. »* concernant son engagement « … Si je suis concentrée sur les abattoirs, c’est parce que j’y ai ressenti le symbole de la perte, du vide, de l’abandon »* pour en arriver à les définir comme « Une plateforme éco-urbaine transdisciplinaire pour les cultures auto-productives des usagers de la ville intelligente du XXIè siècle »* .. .

Il est vrai que la même Sophie Duez se veut « une artiste citoyenne… plus dans l’imaginaire que dans l’intellect »* et s’auto-définit  » toujours en décalage »*.

Toutefois, s’agissant d’une mission publique qui nécessitera un budget d’investissement consistant (on parle de quelques dizaines de millions d’euros) et même si la patience doit être avant tout une vertu républicaine, il ne serait pas mal que la conceptrice du ce futur  » lieu de vie permanent » pour une nouvelle génération de plasticiens * , comme il devrait être dans les souhaits du maire de Nice Chrisitan Estrosi , reprenne la boussole (qui définit les règles générales) et garde le cap (les valeurs) de ce projet abandonnant les tons lyriques dignes d’un Docteur Seraphicus.

Ainsi, finalement, le Sang Neuf 109 pourra être un projet culturel comme il en existe beaucoup d’autres, possiblement sans un coût exorbitant pour des résultats décevants comme malheureusement le sont nombre d’entre-eux.

Il s’agit juste de passer « from de dark to the light » (de l’ombre à la lumière) comme diraient plus pragmatiquement nos amis anglo-saxons !

DES ESPACES EN DÉSHÉRENCE

D’anciennes friches, usines ou entreprises abandonnées, parce que n’intéressant plus les acteurs économiques, deviennent des terrains vagues, vestiges de l’activité humaine et fossiles de cette révolution
industrielle qui devait, en principe, ouvrir à l’humanité un avenir prometteur et de progrès.

Il n’en a rien été et ces usines devenues coûteuses et inutiles ont été fermées, délocalisées là où le coût du travail et de la production était moins important et sont donc aujourd’hui des squelettes de béton pourrissants et lentement se désagrègent, ferrailles rouillées et pans de mur rongés par l’usure du temps. C’est dans ces lieux que vont intervenir des artistes, afin de rendre une existence, une âme et donc la vie à ces centres d’activités industrielles abandonnés.

Plusieurs exemples se sont ainsi développés, chacun ayant sa propre spécificité, son propre caractère, a pu ainsi s’affirmer et exister. La ligne directrice de ces multiples friches est basée sur une opposition aux concepts de compétition et de concurrence « Vous devez être des gagnants. » et Albert Jacquard ajoute : « Mais qu’est ce que c’est un gagnant, sinon un fabriquant de perdant. » Tout est dit dans cette phrase et les perdants vont devenir ces zones d’activité artistique.

De nombreuses villes de province : Nice avec le 109 Sang-Neuf aux anciens abattoirs, Marseille et la Belle de Mai derrière la gare Saint Charles, Lyon et la Sucrière à la Mulatière, Grenoble avec le 102 et le Brise Glace, Bourges et l’Antre Peaux, Mix’Art Myrys à Toulouse, Frûctose à Dunkerque, les abattoirs (là aussi) à Toulouse ou encore Dijon avec le Centre Culturel Autogéré, revendiquent ce droit de Démocratie culturelle.

Les artistes qui se mobilisent dans ces centres industriels où nulle fumée ne vient plus tacher le ciel de nuages de suies, veulent rendre une existence à ces usines dont le coeur s’est arrêté de battre. « Rendre utile ce qui ne l’est plus et surtout se rendre utile. » On
pourrait en faire leur devise. Il y a ici une remise en question, une volonté de rendre une existence à ces structures abandonnées à la fois par les industriels et les promoteurs.

Ces artistes quasiment tous bénévoles sont des précurseurs. Ils nous proposent une nouvelle société, un nouveau concept d’échanges économiques où le profit ne serait plus le moteur de la société. Ils rêvent de dépasser la société post-industrielle. Ils souhaitent affirmer de nouvelles valeurs, de nouveaux fondements de l’appartenance sociale, rendant d’une certaine façon à la société et à l’homme sa capacité de rêver et d’imaginer.

Ces friches sont donc porteuses d’une condamnation de la société de production et de consommation. Cela va au-delà des données
économiques en donnant, ou plutôt en offrant à la création des valeurs qui les dépassent. Cela doit permettre de réactiver ces lieux en leur donnant une nouvelle finalité. Ils redeviendront productifs et les artistes y seront les nouveaux producteurs.

A eux de créer et de donner un nouvel essor où la production sera pérenne dans le temps et leur oeuvre éternelle, appartenant au patrimoine de l’humanité. Ces espaces en déshérence revivent
peu à peu de partout en France. A Nice le 109 Sang-Neuf essaye de répondre à ce défi.

Toutefois, il ne faudrait pas qu’il se prenne pour la grenouille de la fable, car sa réussite en serait menacée.

par Thierry Jan

Auteur/autrice

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