Le député des Alpes-Maritimes a annoncé sa candidature à la mairie de Nice. L’affrontement avec son ancien mentor, Christian Estrosi, s’annonce frontal.
Éric Ciotti a levé le doute. Ce mercredi 27 août, au journal de 13 heures de TF1, le député des Alpes-Maritimes a confirmé qu’il sera candidat à la mairie de Nice en mars 2026. L’annonce marque l’ouverture officielle d’une campagne attendue depuis plusieurs mois. Elle oppose deux figures politiques liées par une longue histoire personnelle et désormais séparées par une rivalité ouverte.
« Je veux faire part aux Niçoises et aux Niçois de ma candidature pour devenir maire de Nice […] pour rassembler, pour réunir et pour donner une nouvelle perspective à cette ville qui souffre aujourd’hui », a déclaré Éric Ciotti. Dans son intervention, il a directement ciblé le bilan de Christian Estrosi, dénonçant une « insécurité croissante », des « impôts qui ont massivement augmenté » et une « situation financière dégradée. »
Le député a aussi présenté quelques premières mesures de son programme : effacer l’augmentation de 25 % des impôts locaux votée en 2024, installer la climatisation dans les écoles et améliorer les structures d’accueil pour les personnes âgées. Des annonces qui visent à incarner une rupture nette avec la gestion du maire sortant.
Cette candidature parachève une évolution politique commencée plusieurs années plus tôt. Ancien président de Les Républicains, Éric Ciotti a quitté le parti en 2024 pour créer l’Union des droites pour la République (UDR). Ce choix l’a conduit à sceller une alliance avec le Rassemblement national, qu’il présente comme une condition de victoire à Nice.
D’un compagnonnage à l’affrontement
Entre Christian Estrosi et Éric Ciotti, l’histoire politique est ancienne. En 1988, le premier, alors député fraîchement élu, recrute le second comme attaché parlementaire. Dans les années 2000, Eric Ciotti devient son directeur de cabinet au conseil départemental, puis son premier adjoint quand Christian Estrosi accède à la mairie de Nice en 2008.
Cette proximité a progressivement laissé place à une rivalité. Eric Ciotti s’impose sur la scène nationale par ses prises de position sécuritaires, tandis que Christian Estrosi se renforce localement tout en participant à plusieurs gouvernements. Leurs trajectoires s’éloignent définitivement en 2021 lorsque Christian Estrosi quitte LR pour rejoindre Horizons, le parti d’Édouard Philippe, et se rapproche d’Emmanuel Macron.
Trois ans plus tard, Éric Ciotti rompt à son tour avec son parti. Il claque la porte de la présidence de LR et fonde l’UDR, avec le soutien du RN. Les deux camps se retrouvent face à face lors des législatives anticipées de 2024. Les candidats ciottistes remportent alors les trois circonscriptions niçoises, battant les proches de Chrisitan Estrosi. Ce succès a renforcé la conviction du député qu’il pouvait viser l’Hôtel de Ville.
Une bataille politique et personnelle
L’élection municipale de 2026 s’annonce comme un duel très personnel arbitré par l’Union des Gauches. Christian Estrosi, qui a officialisé sa candidature dès avril dernier, mise sur la continuité et la défense de son bilan. Éric Ciotti veut incarner le changement et le retour à une gestion qu’il dit « plus proche des habitants. »
Le climat risque d’être tendu. Les relations entre les deux hommes sont marquées par des années de querelles publiques. Certains de leurs proches parlent d’un « affrontement à mort. » Le ton devrait rapidement monter au fil des semaines.
Chacun s’organise déjà pour mobiliser ses troupes. Le maire sortant rassemblera ses soutiens vendredi 29 août lors d’un repas populaire au jardin Albert-Ier, en plein centre-ville. Deux jours plus tard, le député réunira ses partisans à Levens, son autre fief politique dans l’arrière-pays niçois.
L’opposition des deux lignes est claire. Christian Estrosi incarne une droite alliée à la majorité présidentielle, tandis qu’Éric Ciotti revendique une alliance avec le RN et un positionnement sans concession sur la sécurité et la fiscalité.
Une campagne sous tension
L’entrée en lice d’Éric Ciotti intervient dans un contexte particulier. Les municipales se tiendront les 15 et 22 mars 2026, comme l’a annoncé le gouvernement. Mais la campagne pourrait être perturbée par des affaires judiciaires. Trois enquêtes concernant Éric Ciotti sont toujours en cours à Nice, dont deux pour détournement de fonds publics. Le 12 août dernier, une nouvelle affaire a éclaté après des perquisitions au conseil départemental, liées à un supposé fichage politique.
De son côté, Christian Estrosi fait face à des critiques récurrentes sur sa politique d’urbanisme, ses choix budgétaires et certaines dépenses jugées excessives. Ses opposants dénoncent la démolition de plusieurs équipements publics et une hausse continue de l’endettement.
Au-delà de ces dossiers, l’élection s’annonce aussi comme un test pour les alliances nationales. À Nice, le poids du vote d’extrême droite est fort. Marine Le Pen, Éric Zemmour et Nicolas Dupont-Aignan avaient cumulé 38 % des voix lors de la présidentielle de 2022. Éric Ciotti espère capitaliser sur cette dynamique.
Christian Estrosi, lui, mise sur sa longévité politique, son réseau local et sa capacité à incarner la stabilité. Maire de Nice depuis 2008, il vise un quatrième mandat.
Une lettre aux Niçois
Pour accompagner son annonce, Éric Ciotti a préparé une longue lettre adressée aux habitants. Dans ce texte, qu’il compte distribuer prochainement, il détaille son parcours personnel et sa vision de la ville. Il y dresse aussi un portrait de Nice à travers ses quartiers, ses habitants et son histoire.
Le candidat affirme vouloir « restaurer la sécurité », « protéger le pouvoir d’achat » et « renouer avec une vraie politique de proximité. » Il promet une baisse de la taxe foncière et un audit des finances municipales. Il insiste aussi sur la santé, l’écologie et le logement.
Dans ce document, il revendique son attachement à la ville où il est né et appelle les Niçois à tourner la page après dix-huit années de gestion Estrosi.
La bataille de Nice ne sera pas qu’un affrontement programmatique. Elle rejoue une relation personnelle vieille de plus de trente ans. Mentor et disciple sont devenus adversaires irréconciliables.
Le scrutin pourrait marquer un tournant dans la vie politique locale et nationale. Il dira si l’ancrage de Christian Estrosi résiste à la poussée d’une droite radicalisée, ou si Éric Ciotti parvient à transformer son alliance avec le RN en victoire municipale.
Le décor est planté. La campagne commence.