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26 avril 2024

Des poupées sexuées pour libérer la parole des enfants sexuellement abusés

Eloïse Esmingeaud
Eloïse Esmingeaud
Journaliste pour Nice Premium depuis mars 2023

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La fondation Lenval commande ces poupées pour en faire bénéficier à son service d’urgences pédiatriques. Un outil précieux, fabriqué par des seniors bénévoles de la ville qui fait ses preuves depuis un an à la Brigade des mineurs de Nice.

« Il n’y a rien de pire pour un enfant que de vivre à travers sa réalité, sans qu’on ne puisse l’accompagner dans ce traumatisme », déplore Dr Philippe Babe. Le chef des urgences pédiatriques de Lenval rappelle que chaque année, 50 000 enfants sont en danger de maltraitance. Alors, ce dispositif a été mis à la disposition des professionnels de la Brigade des mineurs de Nice, en mars 2022. De quoi faciliter la prise en charge des jeunes victimes abusée.

La ville de Nice grâce à ce projet intitulé « Des poupées pour faciliter la parole de l’enfant », a été récompensée. Fin 2022, elle a reçu le prix national TERRITORIA OR dans la catégorie UNICEF. Une reconnaissance qui a surtout permis la mise en lumière du dispositif. « On a pu en parler à tous les autres territoires. Et même le ministère de la Justice nous pose des questions sur l’existence de ces poupées. On espère que l’Etat lui-même va reprendre le projet« , confie Marie-Pierre Lazard, conseillère municipale de la ville de Nice subdéléguée au Conseil des droits et devoirs des familles.

Un outil de justice et de soin fondamental

Ces poupées de chiffon ont été pensées pour aider l’enfant victime d’abus à mieux se faire comprendre lors d’une audience. En apparence ordinaires, elles ne le sont pas tout à fait. Sous leurs vêtements, orifices, pénis et testicules sont apparents. Des habits colorés crochetés avec amour par une armée de couturières niçoises les habillent. « C’est moins agressif qu’un poupon en dur qui est déjà tout nu », explique Marie-Pierre Lazard, avocate. « Elles sont vraiment jolies et cela facilite le côté intrusif du questionnement« , poursuit-elle.

Fillettes, garçonnets, hommes et femmes de toute forme et de toute couleur sont représentés à travers les traits de ces marionnettes. L’intérêt : que chaque enfant puisse s’identifier et identifier son agresseur. « L’enjeu est aussi d’arriver à des condamnations « , soulève Jennifer Salles Barbosa. Par des mots qu’ils leur manquent, par une compréhension de leur corps d’enfant qu’ils n’ont pas, ces poupées leur permettent par les gestes de décrire concrètement ce qu’ils ont subi. « Pour ces enfants qui ont vécu des traumatismes, s’exprimer de cette façon, permet de s’exprimer tout court pour qu’ils puissent ensuite récupérer leur état de santé mentale et physique », partage Barbara Prot, en charge de la prévention santé à la ville de Nice.

Une initiative intergénérationelle qui a du sens

« C’est la première fois qu’elles tricotent des pénis ! », s’exclame Jennifer Salles Barbosa. « Effectivement, ce n’est pas commun. Mais, elles se sont débrouillées, et ont fait un travail formidable », se réjouit l’adjointe déléguée aux seniors et aux solidarités. La vingtaine de bénévoles a dû créer de toute pièce ce qui n’existait pas. Dès que l’hôpital Lenval a formulé sa demande pour ses propres équipes, les seniors de la ville sont repartis à la tâche. Pour cette deuxième série., elles confectionnent cinq familles de quatre . La municipalité fournit les tissus et les bourrages nécessaires à la confection. L’initiative a reçu également de nombreux dons « de la part de gens qui ne travaillent pas sur le projet, mais qui y sont sensibles », confie Christine Grimault, en charge des séniors bénévoles.

Nicole, bientôt 77 ans, participe activement à ce projet. « Ça me fait plaisir d’aider les enfants, mais ça me surprend beaucoup. Je ne pensais pas qu’il y avait tant de problèmes de cet ordre-là », livre-t-elle à plusieurs reprises. Elle, qui travaillait anciennement dans la couture est heureuse de pouvoir se sentir utile. Et, elle n’est pas prête de s’arrêter. Le groupe en avait déjà fabriqué 32 l’an dernier pour les professionnels de la protection de l’enfance. Jean-François Comas, président de la Fondation Lenval, souligne ce « beau relais entre la société civile et les professionnels de la petite enfance. »

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