
L’Université Côte d’Azur et la Fondation du patrimoine lancent une collecte de dons pour restaurer l’isba du domaine de Valrose, un édifice en bois du XIXᵉ siècle aujourd’hui menacé. Sélectionnée par le Loto du patrimoine 2025, la maison va bénéficier d’un soutien national, mais des financements complémentaires sont nécessaires.
Installée dans le parc du domaine de Valrose entre 1871 et 1881, l’isba est l’œuvre du baron Paul Von Derwies, un homme d’affaires russe venu s’établir à Nice au XIXᵉ siècle. Passionné d’architecture et mécène, il fait démonter une maison traditionnelle bâtie sur l’une de ses terres près de Kiev pour la faire transporter, par train, jusqu’à Nice. La structure, composée de rondins de sapin assemblés à mi-bois, est alors remontée sur le domaine, à proximité du château qu’il vient de construire.
Le baron Von Derwies transforme le lieu en un espace de réception. Ses invités découvrent au cœur de la Riviera un fragment de culture slave, au milieu des jardins dessinés dans l’esprit romantique de l’époque. Cette isba, à la fois rustique et raffinée, devient vite une curiosité architecturale. Elle témoigne du cosmopolitisme de la société niçoise sous le Second Empire, quand la Côte d’Azur attirait la noblesse et les artistes venus de toute l’Europe.
Classée monument historique en 1991, l’isba n’a jamais fait l’objet d’une restauration complète. Exposée aux intempéries, elle a peu à peu perdu de sa solidité. Le bois s’est fragilisé, et les éléments sculptés ont souffert du temps. Les visites sont désormais suspendues pour des raisons de sécurité.
Selon un diagnostic récent, « un diagnostic approfondi révèle une détérioration significative de la structure en bois, menaçant son intégrité structurelle. Sans une restauration rapide, ce monument historique risque de subir des dommages irréversibles et potentiellement une perte totale. »
Un projet collectif pour sauver l’isba
L’Université Côte d’Azur, propriétaire du domaine, a décidé de lancer une campagne de financement en partenariat avec la Fondation du patrimoine. L’objectif est de réunir 15 000 euros pour accompagner un chantier estimé à 740 400 euros. Le projet bénéficie également d’un appui majeur grâce à sa sélection par la Mission Bern et le Loto du patrimoine 2025, qui apportent un soutien à des sites en péril à travers la France.
« La fondation du patrimoine tenait absolument à soutenir l’isba parce que c’est déjà un patrimoine exceptionnel et qui est surtout en grand péril. C’était véritablement indispensable d’intervenir d’autant plus que le financement est difficile à boucler », souligne Jacques Joncour, délégué départemental de la Fondation du patrimoine.
Franck Blanc, directeur du développement durable des sites de l’université, confirme l’urgence : « il y a du travail. C’est désormais sa structure qui est touchée, ses fondements. Il y a urgence. »
Les travaux, prévus pour débuter fin 2025, devraient durer environ un an. Ils concerneront la consolidation de la charpente, la restauration des rondins d’origine et la restitution d’éléments décoratifs disparus, comme les balustrades et les galeries de faîtage. Clémence de Sorbier, architecte des Bâtiments de France, rappelle : « les rondins qui constituent la structure du bâtiment proviennent du domaine du baron dans son pays. Ils ont été démontés morceau par morceau et numérotés pour être remontés ici à Nice. »
Au-delà de la préservation du bâti, la rénovation s’inscrit dans un projet plus global de valorisation du domaine de Valrose. L’université souhaite faire connaître son patrimoine auprès des étudiants, des habitants, des scolaires, des entreprises et des touristes. L’isba rénovée devrait accueillir, à terme, un espace destiné aux étudiants internationaux.
« Nous allons pouvoir envisager de lancer les premiers travaux d’urgence assez vite. Ensuite, l’isba va retrouver vie et surtout, nous pourrons la rouvrir à une vie universitaire tournée vers l’accueil et l’international », ajoute Franck Blanc.
Préserver et transmettre
Ce projet fait suite à plusieurs restaurations menées récemment sur le domaine : le lac, les ponts et le kiosque ont été réhabilités en 2024 grâce à des fonds publics et privés. L’ouverture du parc au public a permis à de nombreux Niçois de redécouvrir cet ensemble classé dans le périmètre du Patrimoine mondial de l’Unesco.
Pour Dominique Larédo, historienne à l’université, « cette isba a été conçue en Ukraine puis démontée et remontée à Nice. » Une phrase qui résume l’étonnant destin de cette maison paysanne devenue, au fil du temps, un symbole du patrimoine niçois.
L’appel aux dons est ouvert à tous, particuliers ou entreprises, via le site de la Fondation du patrimoine.
Les contributions permettront de compléter le financement et d’assurer la sauvegarde d’un témoignage rare des échanges culturels entre la France et la Russie au XIXᵉ siècle.
