

Point n’est besoin de blâmer l’agressivité de ce dernier pour s’enorgueillir ensuite des bonnes conditions de la liberté de la presse dans notre pays. Ce type d’échange eût été impensable au Venezuela, par ce que les télévisions d’opposition n’existent plus ou en Russie où tout ce qui compte de journalistes indépendants s’est retrouvé au chômage. Il fut, même en France, des Présidents qui eussent interrompu immédiatement cet entretien sur cette simple remarque. Non. L’essentiel réside ailleurs. Il y a probablement dans ce bref instant et la nature de ce dialogue la marque fondamentale du quinquennat à venir.
Le commentaire de PPDA, pour désobligeant qu’il soit, reflète finalement ce nouvel état d’esprit: celui d’une rupture de ton défendue dès l’origine par l’ancien candidat de l’UMP, revendiquée tout au long de sa campagne électorale et aujourd’hui entièrement assumée par le vainqueur du 6 mai. C’est la même philosophie que ce dernier tente désormais d’insuffler aux pratiques politiques comme aux institutions vieillissantes de la Vème République en les invitant à « respirer ». On se souviendra utilement, à titre d’exemple, des promesses de lutte contre les « techno-structures » émises par un ancien Président pendant sa campagne électorale. Trois semaines à peine après son élection, il s’y était laissé à nouveau enfermer au point d’éprouver des difficultés à conserver les plus anciens de ses collaborateurs qui n’avaient pas eu la bonne fortune de passer par l’ENA.
Les recommandations exprimées aux membres du Gouvernement de François Fillon lors du dernier Conseil des Ministres en témoignent: la crainte majeure du Président Sarkozy réside dans l’immobilisme et l’isolement inhérents à tout pouvoir capable, tel un puissant sortilège aux effets de confort narcissique, de déposséder les hommes de leur volonté initiale de penser, de dire et d’agir. D’où la répétition dans ses discours du « je » inquiet de se voir diluer dans le « on ». « Glaçante », la puissance étatique déteint le plus souvent sur l’être humain qui l’exerce et qui en devient « glacé » pour plagier les propos du chef de l’Etat. Elle le façonne en quelque sorte alors qu’il croit illusoirement la maîtriser. Les difficultés qui guettent Nicolas Sarkozy ne se trouvent pas donc là où elles sont généralement attendues. S’il tient à respecter ses engagements de « rupture », c’est peut-être avec lui-même qu’il devra livrer le plus astreignant des combats.
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