

Un rapport récent du Sénat s’inquiète de la « capacité de la Russie à honorer ses engagements vis-à-vis de l’Union européenne en matière d’approvisionnement en hydrocarbures, compte tenu de la hausse de la consommation intérieure et du manque d’investissements dans les structures d’exploration et d’exploitation ». Aucun nouveau gisement de gaz n’a en effet été mis en exploitation en Russie depuis 20 ans. De son côté, la Commission européenne estime les besoins en investissements du secteur russe de l’énergie à 735 milliards de dollars jusqu’à 2030, dont la moitié rien que pour le secteur gazier. Des investissements que la crise économique rend des plus incertains. Et pas seulement pour des raisons financières. Comme l’expliquait déjà le Directeur « Moyen-Orient » de Total en septembre 2005 lors d’une journée d’étude organisée par la Fondation pour la recherche stratégique : « La raison pour laquelle nous n’investissons pas davantage est que nous sommes au maximum de nos capacités non pas financières mais…techniques et humaines ». La signature, le 13 juillet 2007, d’un accord entre la « Major » française et Gazprom pour le explorer le champ gazier de Chtokman, situé en mer de Barents -à 600 Km des côtes et par 300 mètres de profondeur en eaux souvent gelées- illustre ce défi technologique. La Russie, notons le au passage, ne vise qu’à accentuer cette dépendance européenne avec le gazoduc « North Stream » qui reliera directement en 2010 -au grand dam de la Pologne et des pays baltes- la Russie à l’Allemagne. Une stratégie doublée de tentatives visant à torpiller le projet européen « Nabucco », certes en mal de financement, mais destiné à permettre d’acheminer du gaz de la Caspienne en contournant le territoire russe par le Caucase.
Depuis l’accord de partenariat entre l’UE et la Russie signé en 1994 et entré en vigueur pour 10 ans en 1997, les Européens cherchent légitimement à donner un nouveau souffle à la relation « stratégique » entre l’UE et la Fédération de Russie. A ce titre, le bilan des « quatre volets » signés au moment de l’accord de St Pétersbourg, fin mai 2003 reste particulièrement décevant : en matière économique par exemple, la France stagne au neuvième rang des fournisseurs de la Russie, loin derrière l’Allemagne ou l’Italie et n’occupe, en matière d’investissements directs russes, que la sixième place après Chypre ! Quant au domaine sécuritaire, les 28 observateurs de l’OSCE ont récemment dû, sous la pression du Kremlin, renoncer à leur mission d’observation aux confins de l’Ossétie du sud. C’était pourtant l’un des éléments clés d’un accord obtenu à l’arraché par Nicolas Sarkozy pour un cessez-le-feu dans le conflit géorgien d’août 2008. Prétendre instaurer, dans ces conditions, un « espace commun de sécurité » comme l’ont évoqué Dmitri Medvedev et le président français au récent sommet de Nice, ne peut que susciter les plus extrêmes réserves.