

A quelques heures du scrutin sans doute le plus important de sa longue carrière politique, Jean Marie Le Pen n’a pas pris de risque. Il s’est contenté d’interpréter le rôle qu’il maîtrise le mieux : celui d’orateur. Il a évoqué ses thèmes favoris : le retour de la peine de mort, la lutte contre l’immigration, le refus de l’union des homosexuels et l’insécurité. Il ne s’est pas éloigné du discours pré écrit évitant tout dérapage verbal. Il est resté derrière son pupitre s’aventurant seulement deux ou trois minutes sur le devant de la scène. Moins agité à cause de son âge ou d’une prudence électorale ? Difficile de savoir… 78 ans est sans doute l’âge de la sagesse. De son discours, on attend encore son programme s’il était élu. Il a commenté de manière sélective l’actualité (Foire du trône, drame de Nantes…) et critiqué les trois autres principaux candidats (Royal, Bayrou et Sarkozy) qu’il qualifie de « Flics de la pensée unique ». « Ils n’ont pas changé…On prend les mêmes et on recommence », martèle-t-il. « Ségolène c’est le socialisme à visage câlin ». François Bayrou a droit à un historique de sa vie politique, de ses faits d’arme ministériels et de quelques contradictions. Cela ne doit donc pas poser de problèmes si on remet sur le devant de la scène certains propos polémiques du président du Front National… Œil pour œil, dent pour dent. François Bayrou est pour M. Le Pen l’homme de l’immobilisme à cause de sa proximité avec les syndicats de gauche. Il le décrit comme un « éleveur amateur qui parle à l’oreille des chevaux qui heureusement pour lui ne votent pas » et le « gratte-papier de Lecanuet ».
Celui qui recueille le plus de raillerie de la part du tribun frontiste est Nicolas Sarkozy. Durant trente minutes, il ne l’épargne pas. On cerne la stratégie électorale : rattraper par le col les électeurs du FN tenter de voter pour le candidat de l’UMP. Il s’adresse directement en l’appelant par son prénom : « Nicolas, vous…. » Nicolas Sarkozy change d’idées comme de chemises, reçoit le soutien de Bernard Tapie en sous entendant un accord sur l’affaire du Crédit Lyonnais, est l’apôtre permanent de la mondialisation, bradeur de la Nation… Bref, le diabolisé devient le diabolisateur. 
Après les crochets, les directs et faux directs, les uppercuts, le ring présidentiel a vu s’affronter des boxeurs pas toujours fair-play. Jeudi à Nice, Le Pen a envoyé des coups en dessous de la ceinture avec pour intention de récupérer des voix irrécupérables sportivement.

