Du 18 octobre 2025 au 25 janvier 2026, le Musée de la Photographie Charles Nègre consacre une grande rétrospective à Michael Kenna. “Constellation” dévoile 124 tirages argentiques en noir et blanc du maître britannique, invitant à un voyage contemplatif entre visible et invisible.
Depuis plus de cinquante ans, Michael Kenna sillonne la planète avec son appareil argentique, à la recherche d’instants suspendus. Né en 1953 dans une petite ville industrielle du nord de l’Angleterre, il a fait de la lumière et du silence ses compagnons de route. L’exposition “Constellation” réunit 124 œuvres issues d’un corpus de plus de 4000 tirages, retraçant un parcours sensible entre les paysages du nord de l’Angleterre, les usines de Detroit, les bords de mer embrumés de France, les temples du Japon ou encore les arbres solitaires de Corée.
Le photographe travaille souvent à l’aube ou de nuit, avec des temps d’exposition pouvant atteindre près de dix heures. Cette patience inouïe donne naissance à des paysages où le temps semble s’être arrêté. L’absence totale d’humains accentue cette impression d’éternité : le monde devient trace, mémoire, silence. Au rez-de-chaussée du musée, les visiteurs découvrent les clichés d’Europe et des États-Unis ; à l’étage, le voyage se poursuit en Asie et en Océanie, territoires où le photographe trouve une forme de spiritualité.
Entre visible et invisible : la photographie comme méditation
Michael Kenna conçoit chaque cliché comme un dialogue avec la nature. Ses longues poses transforment la réalité en vision onirique : un arbre devient calligraphie, un nuage se fond en voile.
Dans sa chambre noire, l’artiste retrouve un rituel presque sacré. Ce moment de tirage est pour lui une expérience religieuse, méditative, vécue dans un silence total. Le photographe y façonne ses images comme un artisan du temps : les noirs deviennent velours, les blancs s’évaporent. Le tirage n’est pas une simple étape technique, mais une seconde écriture, aussi essentielle que la prise de vue elle-même.
Influencé par le shintoïsme et le bouddhisme zen, Kenna cultive une esthétique du vide et de la lenteur. Sa rencontre avec le Japon en 1987 marque un tournant : il y découvre une beauté minimaliste, faite d’équilibre et de retenue. Dans ses images, le vide devient espace de respiration, un lieu où le regard et l’âme se rejoignent.
Une donation exceptionnelle et un lien fort avec Nice
En 2022, Michael Kenna a fait don à l’État français de l’intégralité de son œuvre photographique : près de 3700 tirages originaux et plus de 175 000 négatifs, désormais conservés par la Médiathèque du patrimoine et de la photographie. Ce geste exceptionnel témoigne d’une profonde confiance envers les institutions françaises.
L’artiste entretient par ailleurs un lien particulier avec Nice : déjà invité en 1997 pour l’exposition “10 photographes et une ville”, il avait alors capté l’âme de la cité azuréenne. À l’occasion de Constellation, quatre nouvelles œuvres rejoignent les collections du musée Charles Nègre, prolongeant ce dialogue entre l’artiste et la lumière niçoise.
