On sait le besoin d’immédiateté de nos contemporains. La quête du bonheur n’y échappe pas non plus : on veut être heureux tout de suite et ici même ! Certains petits malins ont saisi tout l’intérêt du filon : mettre sur le marché des offres exceptionnelles « d’extase en kit », moyennant évidemment finances. C’est un peu cette galerie marchande que nous propose de découvrir Stéphane Osmont dans son ouvrage « A la poursuite du bonheur » paru aux Editions Albin Michel. L’auteur nous convie à la rencontre, -parfois un peu furtive mais le temps presse- des concepteurs et « fabricants » du mieux-être : première découverte, l’espèce est tout sauf en voie d’extinction. Disséminée dans le vaste monde, elle aura au moins permis à cet ancien élève de l’ENA de voyager des Etats-Unis au Danemark en passant par Israël et la France. Un budget bien supérieur à celui d’une psychanalyse.
Il s’entretient pour débuter avec le psychiatre et « authentique expert en bonheur » David Servan-Schreiber qui lui prépare un « repas anti-cancer à base d’Oméga 3 », évoque avec lui pêle-mêle les dangers de la « solitude », les « liens entre bonheur et activité professionnelle » et les bienfaits du « contrôle de la respiration ». Pas vraiment convaincu, notre cherchant s’envole pour Tel-Aviv où il espère beaucoup d’une discussion avec Tal Ben-Shahar, professeur de « psychologie positive » à l’Université de Harvard où cette « science » est enseignée depuis dix ans. « Prendre conscience de la valeur des gens et des choses qui nous entourent », « faire de la vie une question de voyages plus qu’une question de destinations », autant d’exercices de la pensée dont l’auteur reconnaît piteusement qu’ils n’ont eu que peu d’effets sur lui. Il s’essaie alors à une démarche plus biologiste, acceptant de se laisser « implanter sur le crâne plusieurs dizaines d’électrodes » pour satisfaire aux recherches entreprises par le neurobiologiste américain Richard Davidson, célèbre pour « photographier » les émotions les plus intimes. Avant de discuter avec son collègue français, le neuropsychiatre Boris Cyrulnik lequel lui indique -enfin- qu’il ne serait pas souhaitable d’inventer une machine à fabriquer du bonheur car « sensations de bonheur et sensations de malheur sont couplées » organiquement dans les zones du cerveau. Au passage, on apprend du spécialiste que les « rapports précoces de l’individu à la vie » font, comme en Israël, « les meilleurs étudiants au monde », qu’il est par ailleurs « préférable de vivre dans les pays scandinaves » où, à l’exemple de la Finlande, seulement 1% des enfants sont analphabètes contre 14% en France. Après un rapide périple à Ringkobing, une petite bourgade du Jutland sur la côte Ouest du Danemark, réputée la « ville la plus heureuse du monde » où il recueille les propos du chercheur Ruut Veenhoven, fondateur du « Journal of Happiness Studies », Stéphane Osmont rejoint à New York l’économiste et prix Nobel Daniel Kahneman, récompensé pour avoir mis à jour la dimension psychologique des décisions économiques.
Finalement, de retour à Paris où une ultime discussion a lieu avec le philosophe Pascal Bruckner, notre éternel aspirant s’en remet, lassé de ce « bonheur scientifique », aux mains expertes d’une masseuse -d’un masseur ?- dans un salon « aux murs rose fuchsia et vert pistache » afin de savourer « les petits plaisirs de la vie », méditer sur la « folie de l’homme moderne » et admettre que le « bonheur est subjectif ». Nous laissant si l’on ose dire en plan ! La psychanalyste Catherine Millot l’avait pourtant bien « interprété » un jour à l’auteur de cette chronique : « Charité bien ordonnée commence par soi-même ».
Stéphane Osmont, A la poursuite du bonheur, Editions Albin Michel, 2009.
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