Pour rendre le théâtre accessible à tous, quel que soit l’âge, le handicap, l’origine ou le niveau social, Isabelle Warnaar a récemment créé l’association ATEV (Association Théâtre En Vie). En parallèle, elle exerce de nombreuses activités. Rencontre avec une passionnée de théâtre qui bouillonne d’énergie.
À 39 ans, elle mène une vie bien remplie : elle est chanteuse, comédienne, professeur de théâtre, intervient dans une maison de retraite en tant qu’animatrice culturelle. Mais ce n’est pas tout : elle est également secrétaire du Collectif des Psychothérapeutes des Alpes-Maritimes et fait partie de l’association « Les Ouvreurs », à l’origine du festival gay et lesbien « In&Out ». Elle étudie à l’IEPA (Institut Européen de Psychologie Appliquée) pour pouvoir exercer l’art-thérapie qu’elle a découvert il y a 3 ans. Un métier qui fut pour elle une révélation. Comment parvient-elle à gérer toutes ses activités ? Même si elle atteint parfois un état de stress, elle répond humblement : « j’ai besoin de travailler. Ce que je fais à l’heure actuelle, c’est un mode de vie. Mon travail c’est mon équilibre ».
L’association ATEV : la « petite dernière »
Afin de pouvoir donner des cours de théâtre à l’UACN (Union des Aveugles de Corse et de Nice), elle a récemment créé l’association ATEV (Association Théâtre En Vie). L’idée de cette entité, elle la doit à Martine qu’elle remercie. « Il y a 5 ans, je donnais des cours pour adolescents. Une maman désespérée est venue me voir avec sa fille trisomique. Elle voulait qu’elle puisse évoluer en dehors du CAT (Centre d’Aide par le Travail). Tous les professeurs de théâtre à l’exception des CAT refusaient de l’intégrer », se souvient-elle. N’ayant pas peur du handicap, elle décida de donner une chance à cette élève de suivre des cours de théâtre. « Sincèrement, c’était une de mes meilleures élèves avec cette capacité d’apprentissage des textes et de travail sur l’émotionnel. Elle n’avait pas peur du regard de l’autre ». Une évidence : les enfants, les adolescents et les adultes handicapés peuvent s’insérer dans un milieu ordinaire.
L’objectif de l’association ? Permettre à tout un chacun d’accéder à des ateliers théâtre, quel que soit l’âge, le handicap, les origines ou le niveau social. À cela s’ajoute l’utilisation de l’art-thérapie comme moyen d’expression, de créativité et de bien-être. Puisque son travail s’inscrit dans une visée thérapeutique, elle se réfère aussi beaucoup aux théories du célèbre psychiatre suisse Jung, son mentor qui a travaillé sur l’équilibrage des émotions, de la pensée, de la sensation et de l’intuition. « Dans mon travail théâtral, je veux arriver à faire toucher du doigt aux gens ces 4 fonctions et les aider à les rééquilibrer ». Explications : « par exemple, lorsqu’un adolescent fonctionne beaucoup avec le mental, parce qu’il n’a pas un contrôle corporel facile, je vais essayer de rééquilibrer, par le biais du théâtre et des exercices, le corps et le mental ».
L’autre défi qu’elle s’est lancée ? « Aider les personnes à travailler sur leurs émotions, trouver leurs ressources, se surprendre et les aider à acquérir de la confiance en soi ». Pratiquer le théâtre constitue une thérapie. L’effet miroir y est induit. Certes, les personnages sont caricaturaux mais en réalité, ils nous ressemblent. Le réalisateur, producteur et scénariste Alfred Hitchcock écrivait : « le théâtre c’est la vie ; ses moments d’ennui en moins ».
Depuis qu’elle a commencé à donner des cours de théâtre à des non-voyants, Isabelle Warnaar reconnaît aussi la fonction thérapeutique de son enseignement sur elle-même : « J’ai toujours peur de la perte de contrôle. Cela m’apprend aussi à laisser l’espace libre à l’autre ». Une question de lâcher prise nécessaire à l’Homme pour son évolution. En effectuant ce travail sur elle-même, elle est parvenue à devenir beaucoup moins exigeante : « je le suis moins concernant une pièce de théâtre, ce qui m’a peut-être aidée à être un peu moins exigeante avec moi-même ».
L’association ATEV revendique sa totale ouverture d’esprit : « il n’y a pas d’anormalité. Chacun est différent certes, mais chacun est normal ». La demande concerne aussi bien les petits, les adolescents, les personnes âgées que les personnes handicapées. « Elle ne fermera jamais sa porte à quelqu’un qui souhaite prendre des cours de théâtre quelle que soit sa différence ! ». Elle s’inscrit dans une réelle volonté d’apporter aux personnes handicapées une certaine autonomie. Il s’agit tout simplement d’une association empreinte d’une profonde humanité.