
Le préfet des Alpes-Maritimes a appliqué la nouvelle loi « narcotrafic » en interdisant à une quarantaine d’individus de fréquenter les lieux liés au trafic de stupéfiants. Cette mesure s’inscrit dans une série d’actions menées ces derniers mois pour tenter d’apaiser certains secteurs sensibles.
Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 13 juin 2025, l’État dispose d’un nouvel outil pour lutter contre les trafics de stupéfiants : l’« interdiction administrative de paraître. » Ce dispositif permet au préfet d’interdire à toute personne impliquée dans un trafic – vendeur, guetteur, rabatteur ou approvisionneur – de se rendre dans les lieux où elle opère. Cette mesure peut être appliquée indépendamment d’éventuelles poursuites judiciaires.
À Nice, Cannes, Grasse et Vallauris, quarante individus sont désormais concernés. Selon la préfecture des Alpes-Maritimes, « 16 individus sont âgés de moins de 18 ans, 20 sont âgés de 18 à 35 ans et 4 individus sont âgés de 35 ans. » En cas de non-respect de cette interdiction, la peine encourue peut aller jusqu’à six mois d’emprisonnement et 3 750 euros d’amende.
L’interdiction s’applique à une portion de la voie publique, à un équipement collectif ou à des parties communes d’immeubles identifiés comme des points de deal. Le domicile de la personne concernée ne peut en revanche pas être inclus.
Le préfet Laurent Hottiaux avait déjà pris les premières décisions de ce type durant l’été. Ces nouvelles mesures confirment l’extension du dispositif à l’échelle du département. La préfecture souligne que « la lutte contre le narcotrafic est une lutte quotidienne. Rien ne sera lâché sur ce terrain. »
Des interventions coordonnées dans plusieurs villes du département
Cette annonce s’inscrit dans un contexte de tensions persistantes autour des trafics de drogue dans les Alpes-Maritimes. Au cours des derniers mois, plusieurs opérations ont été menées pour tenter de rétablir la tranquillité dans certains quartiers.
À Nice, la rue Emma et Philippe Tiranty avait fait l’objet d’un arrêté municipal du 16 au 22 juillet 2025 pour des raisons de salubrité et de troubles à l’ordre public. L’accès y était limité aux résidents et aux personnes ayant un rendez-vous médical ou commercial. Six policiers municipaux y étaient déployés chaque jour pour contrôler les entrées.
L’objectif était de faire cesser « une situation liée à la consommation de drogue dans la rue », selon la mairie. Anthony Borré, premier adjoint au maire, avait alors indiqué que la municipalité avait enregistré « 144 signalements depuis le début de l’année, soit une hausse de 300 % par rapport à 2024. »
À la fin du dispositif, le 22 juillet, Christian Estrosi estimait que la mesure avait permis de « restaurer le calme dans ce secteur, sans générer de difficultés majeures pour les riverains ni de verbalisations. » Il avait cependant appelé l’État à « assurer en concertation avec l’ARS et le CHU, le maintien de la tranquillité publique dans ce secteur. »
Anthony Borré rappelait pour sa part que « les populations toxicomanes relèvent de l’État, de l’Agence Régionale de Santé. En aucun cas, elles ne relèvent de la ville. » Il plaidait pour « la prise en charge des toxicomanes à l’hôpital. »
Quelques semaines plus tard, une autre opération menée à Antibes avait mis au jour un important stock de drogue. Dans un local technique d’une résidence, les enquêteurs avaient découvert plus de 12 kilos de résine de cannabis, 570 grammes d’herbe et 1,3 kilo de cocaïne. Le suspect, gérant d’une sandwicherie, avait été mis en examen pour trafic de stupéfiants et blanchiment d’argent, avant d’être placé en détention provisoire.
Vers une coordination renforcée entre État et acteurs locaux
Parallèlement à ces interdictions de paraître, le préfet a également réuni, le 30 septembre, les bailleurs sociaux du département. Il leur a demandé de signaler les situations dans lesquelles un locataire serait impliqué dans un trafic de stupéfiants, en vue d’une éventuelle expulsion. Cinq signalements ont été transmis aux services de l’État. En cas d’inaction des bailleurs, le préfet pourra saisir directement le tribunal pour résilier le bail.
Cette nouvelle politique vise à sécuriser les immeubles touchés par les trafics et à protéger les autres habitants. Elle s’inscrit dans une approche administrative complémentaire aux enquêtes judiciaires.
En multipliant les interdictions de paraître et les procédures d’expulsion, les autorités espèrent réduire la présence des trafiquants dans les zones les plus touchées.
Des mesures parfois difficiles à faire respecter pour les habitants souvent terrorisés par les trafiquants. Mais pour de nombreux élus locaux, la question reste celle du suivi des personnes concernées. À Nice comme ailleurs, les représentants municipaux demandent que l’État prenne le relais pour assurer, au-delà des sanctions, un accompagnement social et médical durable des publics en difficulté.
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