Croisières : l’État impose un nouveau cadre après des mois de tensions sur la Côte d’Azur

Après plusieurs affrontements entre la Préfecture et la Métropole Nice Côte d’Azur, un arrêté inter-préfectoral entre en vigueur. Il fixe des limites claires pour les escales de navires de croisière. Objectif annoncé : réduire l’impact des flux touristiques tout en préservant l’activité maritime.

Le conflit institutionnel aura duré plusieurs mois. L’État met aujourd’hui un terme à l’incertitude réglementaire autour de l’accueil des paquebots dans les Alpes-Maritimes. Le 9 décembre, le préfet des Alpes-Maritimes et le préfet maritime de la Méditerranée ont signé un arrêté inter-préfectoral. Il encadre désormais l’ensemble des escales de croisière dans le département. Cet arrêté s’applique aux ports de Nice, Villefranche-sur-Mer, Beaulieu-sur-Mer et Cannes.

Il s’agit de la conclusion d’un long cycle de concertation lancé à la suite des tensions de l’été. En juillet, un premier échange avait réuni collectivités, autorités portuaires et acteurs économiques. Un groupe de travail technique avait suivi, avant une réunion plénière en octobre. Le projet d’arrêté a ensuite été soumis à consultation publique puis présenté au CODERST, qui a rendu un avis favorable. La préfecture souligne que cette démarche constitue « une initiative sans précédent. »

Désormais, les règles sont fixées et immédiatement applicables pour toutes les nouvelles demandes d’escale. Elles répondent à plusieurs objectifs : maîtrise des flux, protection de l’environnement, gestion des infrastructures et visibilité pour les opérateurs.

Le texte impose deux limites cumulatives pour les débarquements. La moyenne annuelle ne doit pas dépasser 2 000 passagers par jour d’escale. Et un plafond maximal de 3 000 passagers s’applique pour un débarquement simultané, « quel que soit le nombre de navires en escale. »

Le nombre de navires par port est lui aussi encadré. Un seul paquebot transportant plus de 1 300 passagers peut débarquer par jour et par zone de mouillage. En juillet et août, la limite est de 15 navires par mois pour cette catégorie. Ces restrictions ne concernent pas les navires à quai.

L’arrêté introduit également une priorité pour les compagnies adhérentes à la Charte croisière durable en Méditerranée. Ce document fixe 20 engagements relatifs à la réduction des rejets, des émissions atmosphériques ou des nuisances sonores, ainsi qu’à la protection de la biodiversité. L’État rappelle que les signataires obtiennent une priorité dans les programmations d’escale. Les compagnies sont incitées à adopter des carburants moins émissifs et à développer la sensibilisation des passagers.

Des dispositions spécifiques s’appliquent en cas de pollution atmosphérique. Les préfets peuvent réduire les émissions à trois milles nautiques des côtes. Ils peuvent aussi supprimer des escales si le niveau d’alerte est élevé. Les capitaineries doivent signaler tout dégagement de fumée anormal. La Direction interrégionale de la mer pourra exiger des corrections. Une instruction préfectorale précisera bientôt les modalités de mise en œuvre, notamment le décompte des passagers.

La fin de six mois de débats

Ces nouvelles règles s’inscrivent dans un contexte marqué par des oppositions entre l’État et la Métropole Nice Côte d’Azur. En juillet, un arrêté métropolitain avait tenté de limiter l’accès du port de Villefranche aux navires de moins de 2 500 passagers. Le préfet avait saisi la justice. Le tribunal administratif avait alors rappelé que « seul le préfet peut, dans le cadre de ses pouvoirs de police du plan d’eau, organiser les entrées, les sorties et les mouvements des navires. » L’arrêté métropolitain avait été suspendu.

Une table ronde avait ensuite été organisée le 11 juillet. Elle avait réuni élus, professionnels du maritime, chambres consulaires et compagnies de croisière. La Métropole n’y était pas représentée par son président, mais avait « assuré de son adhésion à la démarche de concertation. »

L’arrêté inter-préfectoral vise aujourd’hui à installer un cadre stabilisé. L’État entend éviter des décisions locales jugées unilatérales et donner de la visibilité aux opérateurs, dont les plannings sont programmés longtemps à l’avance. Les ports azuréens accueillent chaque année un trafic important de croisiéristes. Selon les estimations de la Métropole, les restrictions envisagées cet été auraient concerné près de 200 000 passagers en 2026.

Le nouveau dispositif cherche un équilibre. Il prend en compte la qualité de vie des riverains et les enjeux touristiques. Pour les autorités, l’objectif est clair : encadrer sans bloquer, et garantir une approche cohérente à l’échelle du département. Les mois à venir diront si ce nouveau cadre apaise durablement les tensions entre institutions et acteurs du secteur.

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