
Le syndicat Sud-Rail a déposé un préavis de grève du 5 au 12 novembre pour les salariés de Transdev, nouvel opérateur de la ligne TER Marseille-Nice. Quatre mois après le lancement du service, les agents dénoncent des salaires jugés trop bas et des conditions de travail difficiles.
La promesse d’un « nouveau souffle » pour la liaison ferroviaire entre Marseille et Nice tourne à la crise sociale. Entré en service le 29 juin, Transdev, premier opérateur privé à concurrencer la SNCF sur cette ligne régionale, fait face à un préavis de grève déposé par le syndicat Sud-Rail. L’arrêt du travail doit commencer le mercredi 5 novembre à 19 heures et se terminer le 12 novembre à 8 heures.
Dans un communiqué diffusé sur les réseaux sociaux, le syndicat évoque des « avancées jugées trop faibles » et « de trop nombreux refus » de la direction de Transdev Rail Sud Inter-métropoles (TRSI). Il estime que « l’entreprise fait face à une crise sociale et à un contentieux salarial urgent. » Sud-Rail demande à la direction d’apporter « des réponses concrètes et immédiates » à ses revendications.
Le cœur du conflit porte sur les rémunérations et les conditions de travail. Dans un courrier adressé à la direction, le délégué syndical Frédéric Michel alerte sur les pertes salariales subies par plusieurs employés. « Certains cheminots, qui viennent d’une autre filiale de Transdev, ont subi des pertes de 400 à 600 euros sur ce qu’ils touchaient avant », précise-t-il. Selon lui, « en termes de conditions de travail, il y a régulièrement des heures supplémentaires imposées, et pas rémunérées, des périodes de travail de 12 h… Les salariés n’en peuvent plus. Il y a eu des démissions, et il va encore y en avoir. »
Contactée, la direction de Transdev n’a pas répondu aux sollicitations, pas plus que la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, autorité organisatrice du réseau TER.
Des tensions sociales récurrentes
Pour plusieurs salariés, le malaise est profond. Les employés de la ligne, décrivent « des salaires très bas, des plannings incohérents et épuisants », et des conditions de travail qu’il juge « déplorables ». Ils ajoutent : « les repos sont au minimum, et les conducteurs qui viennent d’être embauchés gagnent 2 000 euros par mois, contre 2 400, 2 500 euros à la SNCF. Il y a déjà des gens qui ont démissionné, parce qu’ils se retrouvent à faire des horaires assez monstrueux, pour des salaires minimaux. Le planning de certains agents au sol est irrégulier. Ils peuvent être de matin, puis reprendre de nuit dès le lendemain par exemple. »
Cette mobilisation intervient dans un contexte tendu pour le groupe Transdev. L’entreprise avait remporté en 2021 l’appel d’offres lancé par la Région pour exploiter la ligne Marseille-Nice. Mais mi-octobre, elle a échoué à décrocher un second lot, attribué à une filiale de la SNCF.
Les premiers bilans d’exploitation, publiés à la mi-août, avaient déjà soulevé des critiques. Le taux de régularité des trains, de fin juin à mi-août, s’établissait à 84 %. L’Établissement public de sécurité ferroviaire avait par ailleurs signalé un incident après le franchissement d’un « carré », un feu rouge dans le jargon ferroviaire.
La grève annoncée sur la ligne TER n’est pas un cas isolé. En octobre, d’autres salariés de Transdev, avaient déjà cessé le travail dans les Bouches-du-Rhône. Ils réclamaient plus de clarté sur les appels d’offres concernant les lignes de la Métropole Aix-Marseille-Provence.
Dans ce département, les tensions se prolongent. Les salariés du dépôt d’Éguilles pourraient de nouveau être appelés à la grève ce 3 novembre par le syndicat FO. Ils dénoncent l’incertitude liée à la perte de leur marché, désormais attribué à la société Suma. Les recours en justice engagés par Transdev repoussent le calendrier et maintiennent le personnel dans l’attente.
Une ouverture à la concurrence sous tension
Quatre mois après la mise en concurrence historique de la ligne TER Marseille-Nice, la promesse d’un service plus efficace se heurte à la réalité sociale. Les agents de Transdev dénoncent un modèle basé sur la réduction des coûts, au détriment des salaires et de la qualité de vie au travail.
Cette première grève, qui s’annonce « très suivie » selon les agents, pourrait fragiliser un peu plus la crédibilité du modèle concurrentiel voulu par la Région. Les négociations à venir diront si Transdev parvient à apaiser le climat et à restaurer la confiance parmi ses salariés. En attendant, les usagers risquent d’être, eux aussi, pris dans la tourmente.