Néréides Cup : quand la mer devient moteur d’émancipation

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Née d’un cri de colère, la Néréides Cup s’est imposée comme bien plus qu’une simple régate féminine. Sous l’impulsion de sa fondatrice Pat Shereen Aglaé, cet événement unique à Nice transforme la mer en espace d’inclusion, de sororité et de renaissance.

Chaque année à Nice, des dizaines de femmes venues d’horizons très différents se rassemblent pour hisser les voiles et prendre la mer. Certaines sont cheffes d’entreprise, d’autres enseignantes, certaines en reconversion ou atteintes d’un cancer. Beaucoup n’avaient jamais mis le pied sur un voilier avant cette aventure. C’est ça, la Néréides Cup : une régate 100 % féminine, née d’une colère intime et transformée en formidable outil d’émancipation.

« À la base, je ne m’intéressais pas vraiment à la mer, même si je suis née au bord de la Méditerranée », confie Pat Shereen AglaéProfesseure d’histoire-géographiescénaristecomédienne amateur et ancienne journaliste, elle est aussi une femme engagée. Tout a basculé en 2007, après une opération chirurgicale compliquée qui la laisse handicapée pendant huit mois.

« Je ne pouvais plus marcher, ni même faire ma toilette. C’est à ce moment-là que j’ai découvert la sororité. Des femmes artistes sont venues m’aider, sans rien attendre en retour. »

Ce soutien bouleverse sa vision. Lors d’un stage au Yacht Club de Monaco, Pat découvre l’univers des régates, très masculin. « Je voyais ce petit bout de femme au milieu de tous ces hommes. C’était comme voir la fée Clochette tenir la barre. Et je me suis demandé : pourquoi n’y a-t-il pas plus de femmes ici ? » De cette interrogation naît une idée. Puis un défi. Puis une révolution.

Une régate née d’un « cri de colère »

« La Néréides Cup est née d’un cri de colère », raconte Pat Shereen. Colère contre l’invisibilisation des femmes dans l’événementiel, contre les stéréotypes, contre les inégalités persistantes« J’en avais assez d’être jugée sur mon physique plutôt que sur mes compétences. J’avais fait de belles études, j’étais diplômée de l’École du Louvre, et pourtant, je gagnais moins que mes collègues masculins. »

Cette rage devient moteur. Elle décide de créer la première régate entièrement féminine, ouverte aux amatrices, pour que la voile devienne un outil de résilience« Je voulais que des femmes comme moi puissent se dire : peu importe ce qui nous arrive, on peut s’en sortir. »

La première édition voit le jour sur un bateau mythique, le ZakaTrente femmes qui n’avaient jamais navigué montent à bord. Et la magie opère. « En pleine mer, elles reprenaient confiance en elles. Elles se sentaient reboostées. Là, j’ai compris que j’avais trouvé ce que je voulais faire. »

Des voiles pour toutes les femmes

Depuis, la Néréides Cup a grandi, attirant chaque année des participantes d’horizons très différents : avocatesfemmes de ménagemédecinsfleuristesfemmes en situation de handicap« Je me souviens d’une femme malvoyante qui a tenu la barre pour la première fois. C’était bouleversant. Ou encore de jeunes filles trisomiques qui, une fois sur l’eau, étaient unies avec toutes les autres. C’est là que j’ai gagné mon pari humain : fédérer des femmes et les voir heureuses. »

Les histoires qui découlent de ces expériences sont nombreuses. « Un jour, un assureur m’a reconnue. Sa femme avait participé à la régate et en parlait tout le temps. Elle s’est inscrite dans un club de voile. Une autre participante a créé une association pour aider des jeunes filles en Thaïlande. Elles ont eu besoin d’un déclic, et ce déclic, ça a été cette régate. »

L’inclusion au cœur du projet 

Cette année, l’événement franchit une nouvelle étape. Outre les femmes atteintes de cancer et les enfants de l’association Léa, la Néréides Cup accueille pour la première fois un équipage LGBTQIA, baptisé Calypso« Elles sont géniales, hautes en couleur. Je suis très fière d’avoir cette diversité. Je suis moi-même métisse, et j’ai envie que cette diversité s’exprime de façon positive. »

La Ville de Nice joue un rôle essentiel dans cette aventure. Sans son soutien, la régate n’aurait pas pu voir le jour.

Pour Pat Shereen Aglaé, la Néréides Cup doit devenir plus qu’un événement sportif. Elle imagine un village autour de la régate, avec des animations pédagogiques, des spectacles, des expositions, et pourquoi pas, des rallyes nautiques féminins sur le modèle du Rallye des Gazelles« Je veux que ce soit un rendez-vous où les femmes savent qu’elles seront en sécurité, qu’elles vivront une expérience différente, qu’elles se révéleront à elles-mêmes. »

Plus qu’une régate, un mouvement

Si l’objectif premier est de fédérer, l’esprit de compétition n’est jamais loin. « Au départ, elles disent avoir peur. Mais dès qu’elles comprennent ce que veut dire bâbord, tribord, qu’elles savent hisser une voile, elles deviennent très compétitives ! » sourit Pat.

Mais la fondatrice voit plus loin que les voiles et les podiums. « On vit une époque où, dans certains pays, les droits des femmes reculent. Ici, je veux envoyer un message inverse : on ne les fera pas reculer. » Pour elle, la mer est un espace de liberté, de solidarité et d’écoute« Elle efface les différences. Elle nous rappelle qu’on fait toutes partie du même équipage. »

De son cri de colère est née une onde de solidarité qui ne cesse de grandir. Avec la Néréides CupPat Shereen Aglaé prouve que la mer peut être bien plus qu’un terrain de jeu : un lieu de renaissance, un levier d’émancipation, un espace où les femmes se découvrent des forces insoupçonnées.

« Si j’ai pu donner envie ne serait-ce qu’à une seule femme, alors tout cela valait la peine », conclut-elle.

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