Littérature : La fille du feu d’Aurélie Wellenstein

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La fille du feu
Illustration de couverture © Aurélien Police

Spécialiste des récits imaginaires, Aurélie Wellenstein écrit depuis plus de 10 ans avec une prédilection pour des thèmes touchants à la nature, au monde animal et à la magie avec un onirisme évident. Paru en mai dernier, chez Fleuve Éditions, La fille du feu est un récit initiatique porté par une enfant dévorée par le feu.

Brasier au cœur du Grand Nord Canadien

Mia est australienne, pourtant c’est dans le Grand Nord canadien qu’elle erre désespérément. Elle a tout perdu : son foyer, ses amis, son pays, sa famille et tout récemment, sa mère. Pourchassée pour son feu intérieur, elle ne sait plus où aller dans ce territoire hostile et glacé.
Non loin de là, Nathanaël vient d’arriver à Ilussuaq, petit village inuit, où il espère pouvoir enregistrer les traditions orales locales qui menacent de disparaître. Des tatouages d’animaux recouvrent son corps marqué par les brûlures.
Cadzow sera son guide dans cette contrée, un inuit stoïque qui veut préserver la culture ancestrale de son peuple. Mais lui aussi est hanté par une terrible incandescence. Et quand il abat un ours affamé menaçant le village, la collision de ces trois destins est inexorable.

Après avoir longtemps été publiée chez Scrineo, Aurélie Wellenstein arrive chez Fleuve en 2024 avec La harpiste des Terres rouges et publie cette année La fille du feu. Au cœur de son nouveau récit, les flammes. Au tout départ, les violents incendies en Australie en 2019 et 2020 avec leurs images atroces de koalas à la fourrure roussie ou opossums aux pattes calcinées qui ont fait le tour du monde.
Un événement réel comme point de départ de l’exil forcé pour Mia et sa mère, bien décidée à la sauver. C’est ainsi qu’elles se retrouvent à plus de 10 000 kilomètres de leur foyer et que la destinée des trois protagonistes va basculer.

Trois forêts, trois héros au passé fragile

Chacun porte dans son corps et son âme, une forêt brulée. Le bush pour Mia. Une forêt du sud de la France pour Nathanaël et les forêts boréales du Grand Nord pour Cadzow. Et leurs trajectoires vont s’entrechoquer à cause de la folie d’un homme.
Aurélie Wellenstein décrit chacun d’eux avec force et justesse, leur psychologie évoluant, se modelant au gré du récit, se transformant dans l’épreuve. La relation entre Nathanaël et Mia est particulièrement touchante, notamment le cheminement personnel du jeune homme, celui des trois dont le trauma est le plus ancré, le plus vif malgré les années et sans aucun doute, celui qui en souffre le plus.

L’onirisme du départ, le fantastique instillé par Aurélie Wellenstein va peu à peu se transformer en thriller avec une traque à travers la nature canadienne, sauvage et encore indomptée. Utilisant cette dernière comme un baume guérisseur, l’auteure fait se confronter les drames intimes de ses héros aux événements climatiques que notre monde connaît actuellement. Avec une plume descriptive et envoûtante, Aurélie Wellenstein offre un récit à trois voix pour évoquer les traumas non résolus, les pertes de repères quand survient une catastrophe naturelle, les inquiétudes d’une partie de l’humanité envers l’écologie et les changements climatiques. Grâce au fantastique, Aurélie Wellenstein en fait des forces surnaturelles pour faire (re)naître l’espoir.