

Un simple concours de beauté et pourtant la chose ne va pas toujours de soi chez les descendants des élégants Phéniciens. Le Ministère du Tourisme qui accrédite ce genre de manifestations laisse parfois le champ libre à des non-professionnels « peu scrupuleux », selon Iyad Rachid l’organisateur de « Miss & Mister Beyrouth », et avides d’intérêts purement commerciaux aux dépens de besoins simplement humains et alimentaires des candidats. « 80% du modeling au Liban n’en est pas vraiment », assure-t-il encore, au « risque de voir se diluer la valeur des trophées attribués ». Associé pour l’occasion à divers professionnels de l’esthétisme ( Institut Ramona, Salon Zena, le créateur de Haute-Couture Bilal Dona), lui-même propriétaire d’un restaurant à Beit Merry situé sur les hauteurs de Beyrouth, Iyad Rachid admet ne pas être un spécialiste. Il clame cependant haut et fort son honnêteté : il exclue ainsi toute exploitation en rejetant la pratique de la signature par les candidats d’un contrat d’exclusivité. Et ce, « contrairement aux pratiques habituelles » des agences conclut-il.
Le Grand Hôtel « Coral Beach » de Beyrouth Ouest accueillait ce soir là l’élection de « Miss & Mister Beyrouth ». Dans les « salons de l’Ambassadeur », la salle debout se fige lorsque retentit l’hymne national qui ouvre au Liban toute manifestation officielle mais dans les coulisses, c’est plutot l’agitation : chez les hommes, le gel coiffant passe de mains en mains. Chez les filles, de l’autre côté du couloir, une file d’attente se presse pour venir s’asseoir auprès d’une maquilleuse, reine d’une ruche singulièrement armée d’une impressionnante panoplie de mini pinceaux, de multiples batteries de tubes colorés et d’une armada de houppettes poudrées.

Du côté des candidats masculins, Elie est coiffeur dans un salon de Kaslik et pratique la musculation quatre jours par semaine, Hassan poursuit des études en électro-mécanique, Nidal est inscrit à l’AUST de Beyrouth, Fouad est « Architecte Designer », Bilal est coiffeur à Choueiffat sur la route qui mène au sud vers Saida, Robert travaille dans un grand magasin de vêtement du Centre commercial ABC d’Achrafiyeh, Mohammad (lauréat), au corps tout aussi « sculpté » que celui d’Elie, est inscrit en Affaires internationales à l’Université Arabe de Beyrouth.
Tous et toutes partagent le même espoir : la reconnaissance de cet investissement personnel et une percée dans le monde la mode : c’est-à-dire exprimé très concrètement, « sortir du Liban ». Ils et Elles seront interrogés sur les raisons de leur présence à ce concours, leur relation à la beauté et devront s’efforcer de convaincre par leur réponse le jury responsable du questionnaire, que « esthétisme peut rimer avec l’expression d’une personnalité ».

« La beauté est plus forte que l’argent et la religion ne doit pas s’en mêler », lance Iyad Rachid et d’ajouter mezzo voce : « si un politicien se présentait ce soir, je me ferai un plaisir de lui indiquer la porte de sortie ». Preuve que la situation politique ne cesse d’interférer, cette manifestation a été reportée à quatre reprises en raison des différents attentats qui ont frappé la capitale libanaise ces derniers mois. Iyad Rachid prévoit toutefois un « Miss & Mister Plage » légèrement plus dénudé…seulement après le déroulement hypothétique et à haut risque de l’élection présidentielle.
Avec l’aimable collaboration de la photographe libanaise (New York) Jessica Kalache : jkalache@gmail.com










